CamilleG

Harcélement à l’école : un lecteur témoigne

C’est un article particulier que vous vous apprêtez à lire aujourd’hui. Il est tiré du témoignage d’un lecteur. Romain a subi du harcèlement pendant TOUTE sa scolarité. Je le remercie pour sa confiance et j’espère ainsi dénoncer, à mon niveau, ce qui ne devrait plus exister…

« J’ai de vagues souvenirs de mon enfance, je sais que je n’étais pas timide au tout début mais je le suis devenu très vite. Vers l’âge de sept-huit ans j’étais d’une timidité maladive, du genre à être gêné devant des membres de ma famille que je n’avais pas vus depuis six mois. Et forcément cela s’est révélé très gênant à l’école.

Tout a commencé en CE2

Dès la primaire, un élève me harcelait et m’intimidait.  Et même à la sortie de l’école, il lui arrivait de nous suivre ma mère et moi et de l’insulter. Des explications avec sa mère n’ont rien changé, elle le couvrait. Même le directeur avouait être conscient que cet élève embêtait beaucoup de monde mais il concluait qu’il ne pouvait rien faire. Ma mère a fini par me changer d’école. Le reste de la primaire a été normal mais ma timidité n’a fait qu’augmenter.

Au collège c’était pire

Après une sixième sans trop de soucis je suis entré en cinquième et deux élèves de ma classe ont eu le même comportement que celui de la primaire. Sauf que cette fois je n’osais plus rien dire, j’étais bien chez moi et mal à l’école. J’ai vraiment divisé ces deux mondes et j’ai commencé à délaisser les cours. C’était peut-être une erreur mais je n’avais rien envie de donner à l’école avec tout ce qui se passait.

Je suis alors devenu autodidacte et j’ai appris de mon côté ce qui m’intéressait, ce qui me permettait sans apprendre mes leçons d’avoir des connaissances et la moyenne dans les matières qui étaient proches de mes centres d’intérêt comme le français ou l’histoire-géographie. Cependant je n’avais forcément pas de bons résultats dans les autres matières.

Je suis passé en quatrième et malheureusement un élève a remplacé les précédents pour me persécuter encore plus. Un des deux élèves de cinquième était toujours là mais moins déterminé à me harceler. Le nouvel élève, en revanche, avait parfois la manie de me suivre jusqu’à chez moi. Ce qui était le pire à mes yeux étant donné que l’extérieur de l’école était mon sanctuaire, et lui brisait cette bulle sans pitié !

Ma mère n’était pas là et ne s’est jamais aperçue de rien. Je cachais tout et même mes résultats n’étaient pas mauvais au point de se poser des questions. En revanche le cauchemar à l’école était permanent. Cette année-là l’élève qui m’embêtait moins que l’année précédente a quand même réussi à me faire pleurer en plein cours. Il y avait une mode des sarbacanes et cet élève ainsi qu’une autre se sont relayés pendant toute une heure de cours pour me tirer dessus, à bout portant vu qu’ils étaient derrière moi. Au-delà de la douleur supportable c’était la surprise qui me faisait sursauter à chaque fois, forcément j’étais tendu et je ne pensais plus qu’à ça. J’ai fini par craquer et par pleurer en me cachant la tête dans les bras.

Chaque année, un nouvel harceleur

Et arrivé le redoublement et enfin je n’avais plus aucun élève que je connaissais. Seulement les mêmes schémas se reproduisaient toujours et je n’ai pas été étonné qu’un nouvel élève prenne le relais. En plus de retrouver les sarbacanes j’ai failli éviter le pire. Je vous explique. Un jour cet élève est venu en classe soit bourré soit drogué, et malheureusement son état ne l’a pas empêché de se souvenir de moi. Il a eu la bonne idée de me balancer un compas. Il m’a juste piqué le ventre et fait un petit point rouge, mais il aurait très bien pu me crever un œil ou celui de quelqu’un.

Et puis je suis passé en troisième malgré des résultats identiques à l’année précédente. Enfin il n’y a plus eu d’élèves pour me harceler malgré quelques mésaventures. Le retour des cours de musique et des moqueries par exemple, avec une salle disposée en L et un chant devant tout le monde qui m’avait fait tellement de mal que j’avais préféré faire semblant d’être malade au chant suivant. La prof avait dû s’en rendre compte car elle m’a épargné de le rattraper la semaine d’après.

Et enfin, le pire qu’on ait pu me faire : c’était en dehors du harcèlement car ce n’était pas des élèves que je connaissais et c’est la seule fois que nous nous sommes croisés. J’étais tout seul entre deux cours en train de me diriger vers le suivant, deux garçons m’ont croisé dans un couloir et sans prévenir l’un d’eux m’a craché sur la figure, et puis ils ont continué de marcher comme si de rien n’était ! J’étais abasourdi devant une telle méchanceté gratuite, j’avais honte de n’avoir pas réagi et de sentir encore l’odeur puante de son crachat sur ma figure.

Terminé le collège, peut-être que tout ira mieux…

Au lycée je n’ai plus subi ce genre de choses en dehors de moqueries lointaines sur mon physique. J’étais plein de complexes et je me trouvais très moche. Ma très grande taille ne m’aidait pas à passer inaperçu et on m’a bien fait ressentir que j’étais laid tout au long de ma scolarité. Il m’était difficile de penser autrement. Je me rappelle d’une fille que j’avais croisée à la sortie du lycée et qui sans raison aucune m’avait lancé « t’es moche » avant de poursuivre son chemin. Il n’y avait quasiment plus que des filles dans ma classe et c’est peut-être pour ça que je n’ai plus eu de problèmes réguliers comme au collège. Mais j’en avais assez, je commençais à devenir très idéaliste et la mentalité des lycéens m’insupportait. J’ai eu en l’espace d’un mois mes 18 ans et mon BEP, alors j’ai fini par arrêter mes études. J’ai profité de ma liberté nouvelle et je me suis encore plus refermé sur moi-même pour me reconstruire.

J’ai perdu toute confiance en moi et j’ai désormais 30 ans

Aujourd’hui je me sens bien, je me suis découvert et construit tout seul, j’ai continué de développer mes idéaux. Seulement il reste encore les conséquences de ce qui m’est arrivé à l’époque avec l’arrêt de mes études. Les années passent et je ne suis pas doué pour me vendre auprès des entreprises, ni pour nouer des contacts avec les gens. J’en arrive à 30 ans sans avoir jamais travaillé et sans jamais avoir eu de copine. Je me sens particulier et j’ai du mal à être sur la même longueur d’ondes que les autres.

Je voudrai donc dire que quoi qu’il arrive il ne faut pas faire comme moi en cas de harcèlement, il faut parler et dénoncer. On a peur des conséquences, seulement ce qui se passe est déjà très grave et anormal. Je me disais que c’était un peu ma faute si les autres me trouvait étrange et me faisait du mal, mais ce n’est pas vrai. C’est la même chose que les personnes qui disent qu’une femme est responsable si elle est en jupe pendant une agression. Mais ce n’est pas vrai : à partir du moment où on ne fait rien de mal à qui que ce soit, on n’a pas à être agressé ou persécuté. »

Merci Romain pour ce poignant témoignage.

Je souhaiterais utopiquement que les parents, qui me lisent, suivent leur(s) enfant(s) de près pour ainsi éviter ce genre de situations, qui peuvent briser la vie des jeunes. Tout comme Romain j’ai subi du harcèlement. En classe de cinquième pour être précise. Une fille, prénommée Morgane, me pourrissait la vie tous les jours. Et les week-ends elle appelait sur le fixe de mes parents et m’insultait de « pauvre conne » et elle me raccrochait au nez. J’avais la boule au ventre d’aller au collège. J’étais très triste. Ce fut une horreur je peux vous le garantir.

Je pense que nous avons tous subi, à des niveaux différents de sales expériences à cause de sales gamins. Et les réseaux sociaux ne feront qu’empirer, malheureusement ce phénomène… Et vous, quelle est votre vision de ce fléau sociétal ?