En bon mouton de Panurge il va s’en dire qu’exhiber ses clavicules dessinées, ses genoux osseux, ses joues creusées ou bien son arc de Triomphe entre les cuisses, c’est franchement le top du top. Le laisser passer pour la vie tant rêvée. Attention cet article ne critique en rien les individus ayant une ossature naturelle de la sorte. On est à la pointe de l’idéal féminin. Mais l’idéal selon qui ? Notre entourage ? Notre mec ? Notre collègue ? Et bien non… Selon la société et ses messages publicitaires, pire, selon la base : les créateurs et leurs mannequins. Je pourrais ouvrir un long et éternel débat au sujet des cadavres sur pattes, mais la question a été tellement vue, évoquée et revue par toute la cause féminine, que je n’en vois pas l’intérêt. Et puis je suis mal placée pour ne pas la jouer avocat du diable, ayant moi-même été formatée par la fashion industry lors de mes années de mannequine. Stelda, une journaliste-blogueuse dont la plume ferait blêmir plus d’une, m’a interviewée pour TMV Mag Tours sur le remue-ménage politique autour de l’image de maigreur reflétée par les filles des magazines et des podiums. Un sujet déjà évoqué par la droite, en 2009 qui n’avait aboutit que sur le néant de l’hypocrisie. Rien n’avait changé, les maigrichonnes continuaient d’affluer sur nos papiers.
Pour un grand nombre, la maigreur sonne comme la quête du Graal. Un but auquel on aspire pour se sentir soi-disant en harmonie avec son corps. Courir après l’impossible anime l’espoir. Glisser sur un chemin rempli d’embuches pour terminer dans la case dépression chronique en passant par les troubles du comportement alimentaire. Bienvenue dans la réalité finale. Je lève le sourcil quand je croise celles qui n’ont à la bouche que le mot régime. Je tressaille quand je tombe sur des blogueuses mode rachitiques et je ferme les yeux quand je vois ces assiettes vides… Durant ma période de mannequinat j’ai souffert pendant des années de la pression enkilosée des agences. « Perdre x kilos pour partir à NYC, pour décrocher tel contrat, pour aller sur davantage de castings… ». Au bout du bâton une minuscule carotte light suffisait à m’animer pour toujours manger moins. Mes hanches rentraient limite dans ce 36, mes os ne pouvaient pas fondre sous ma colère, quelle hantise que celle de ne pas pouvoir avoir la main mise sur sa morphologie… Puis un jour j’ai atteint les 53 kilos pour mon mètre 76. Je perdais mes cheveux. Je faisais souvent des petits malaises. Je ne mangeais presque rien et pourtant j’avais la sensation de faire de véritables repas.
Mes amis se posaient des questions sur ma santé, moi je me demandais comment j’allais faire pour encore diminuer la flèche de la balance. Je me voyais et me pensais « grosse ». Pourtant je plaisais et je décrochais des contrats. Mais cela ne semblait pas me suffire. On tombe dans un engrenage en s’imaginant pouvoir toujours obtenir mieux et plus sans jamais connaitre la satisfaction. Fucking cercle vicieux. Où veux-je en venir ? J’aimerais simplement alerter les personnes en quête de maigreur : même en perdant vos kilos superflus (ou non) ne vous imaginez pas que votre vie pendra tout son sens et qu’un nouveau tournant s’offrira à vous. Vous êtes dans le faux, votre corps vous le fera payer d’une façon ou d’une autre. N’allez pas contre Dame nature, vous risquez de soulever la colère de votre métabolisme. N’oubliez jamais que vote corps est votre ami pour la vie, c’est grâce à lui que vous existez. Je vous en prie ne commettez pas les mêmes erreurs que moi, ne luttez pas contre votre nature morphologique, n’allez pas vous imaginer que vous êtes invincible. Cette souffrance n’en vaut pas la peine.