CamilleG

Je ne porterai plus jamais de talons

Alors que certaines pondent, fièrement, des articles libérés où elles expliquent pourquoi elles ne portent plus de soutien-gorge (et si ça se trouve plus de culottes non plus), me voilà qui publie une histoire de chaussures… à talons ! Les lecteurs fétichistes vont se régaler, je vais vous parler de pieds.

En juin 2017 j’ai appris une grave nouvelle : je ne pourrai plus jamais porter de talons. #FinDuMonde

Quand mon orthopédiste m’a annoncé cela, j’en ai eu le souffle coupé. J’ai repensé à cette trentaine de paires de plus de six centimètres de talon, rangées dans mon dressing. Elles et moi, dorénavant, c’est terminé. Et puis j’ai songé à toute la place que j’allais pouvoir faire dans mon armoire. Non je déconne, j’ai juste vu ma féminité s’envoler et je n’ai pensé à rien d’autre lorsque le chirurgien a prononcé ces cinq mots

« Et les talons vous oubliez. » BIMMMM dans ma face.

Alors pourquoi je vous raconte cela ? Et surtout pourquoi est-ce que je ne pourrai plus me la raconter, perchée sur douze centimètres ?

Gros suspense. Et pour le savoir, direction mes stories Instagram ! AHAH non je déconne, sérieusement, j’ai autre chose à faire que d’étaler la life de ma tasse de thé ou celle de mon jean fétiche signé DenimStudio (cette marque est absolument géniale, je vous en reparlerai prochainement).

La réponse est simple et porte le doux nom d’hallux-rigidus (prononcé aluxe rigidusse). Au début, moi aussi, j’ai cru que c’était le blase d’un personnage tiré de la bande dessinée d’Astérix. J’imaginais déjà un héros qui régnait sur la ville de Lutèce. Mais non… Il s’agit de ma nouvelle copine, la pathologie du pied. Si vous aussi vous connaissez ce calvaire, n’hésitez pas à vous manifester dans les commentaires et à partager vos astuces ! Soyons solidaires, enlevons-nous une épine du pied en partageant nos conseils. Le jeu de mot c’était cadeau.

J’ouvre une parenthèse médical. Attention à ne pas confondre hallux-rigidus avec hallux-valgus (qui signifie oignon en français). #InstantGlamour.
Non mes pieds ne vont pas se transformer en champignons géants, ou bien terminer en cuisine sur Top Chef pour assaisonner votre salade healthy. Non, moi j’échappe à cette histoire moisie herbacée qui vous fait pousser une espèce de boule sur le côté de vos gros orteils. Cette étrange déformation du pied touche principalement les femmes, comme par hasard (moi je vous l’dis celui qui a créé la femme était carrément misogyne). Vu comme ça, je vous l’accorde ça semble relou. Mais moi j’ai PIRE. J’ai le truc rigidus.

Rien qu’en entendant le nom j’ai compris que j’allais désormais morfler et que ma vie allait devenir plate… côté chaussures bien évidemment.

Avant, je galopais en talon. Easy !

Alors qu’est-ce que c’est que donc ce truc bizarre ?
Pas de panique, je ne vais pas vous sortir un copié-collé de wikipédia. Je vais vous expliquer avec mes mots de nana qui ne comprend rien au jargon médical orthopédique. En gros, l’hallux rigidus (ou hallux limitus, au choix) est le nom de l’arthrose du gros orteil. Il s’agit d’une maladie dégénérative de l’articulation métatarso-phalangienne, le plus souvent sans cause connue (mais soyons honnêtes, les docs sont dépassés par les maladies ils ne comprennent jamais trop le pourquoi du comment). Pour protéger cette articulation inflammée au nom imprononçable, le corps va fabriquer des os, ce qui va rendre l’articulation encore plus douloureuse. Le but naturel de cette création d’os ? A part clairement, m’emmerder ? Bloquer l’articulation. SAUF QUE CE PROCESSUS FAIT HYPER MAL.

Okay j’ai perdu tout le monde. Je vous montre tout ça en photo.

Mais qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu ?
Tout commença courant 2015.
Je n’arrive pas à poser une date précise sur le début de ces foutues douleurs. A l’époque, je portais au moins quatre fois par semaine des talons. J’adorais ce sentiment de grandeur (1m76 + au moins 6 cm de talon je vous laisse calculer), sans parler de l’allure gagnée grâce à mes pompes. En soirée, je dégainais mes échasses et dansais sans complexe #LesTalonsAffinentViveLaTriche. J’ai toujours considéré ces centimètres comme une preuve de féminité et de démarcation. Cela me rassurait et me donnait davantage confiance en moi. Mais ça c’était avant…

Je pourrais débattre longtemps sur les bienfaits esthétiques des talons. Mais comme dirait mon orthopédiste, qui tentait de me rassurer : « les chaussures à talons nous amènent beaucoup de patients. Elles sont responsables des maux de dos, soucis de genoux.. Les talons ne sont pas naturels pour votre corps. Il n’est pas fait pour endurer cela. Vous allez voir, la vie sans talons c’est pour une meilleure santé ! » Ah……………………………. Génial.

Bref, en 2015 j’ai commencé à ressentir ressentir des douleurs dans mon gros orteil droit, surtout lorsque je portais des… talons.
Au début j’ai cru que c’était lié à un faux mouvement, ou bien à une paire de shoes de mauvaise qualité. J’avais un peu mal mais je prenais sur moi. #IlFautSouffrirPourEtreBelle
A partir de l’été 2016 j’ai vraiment commencé à douiller, et ce même lorsque je marchais en Stan Smith. Je souffrais tellement que j’ai fini par me retrouver aux urgences un samedi après-midi.

Ce jour là, je me souviens, je n’arrivais plus à marcher, j’avais affreusement mal. J’ai attendu deux heures. J’ai passé une radio. J’ai été reçue en consultation par une interne qui découvrait, je crois, les pieds.

« Bon alors. A la radio tout est normal. Je pense que vous avez une tendinite du gros orteil. Je vais vous prescrire quinze jours d’anti-inflammatoires. Et si ça ne passe pas, prenez rendez-vous chez votre médecin. »

A contre coeur j’ai pris le traitement. Quinze jours plus tard j’avais encore mal.
J’ai appelé une clinique spécialisée dans les pathologies du pied, à 90 euros la consultation.
J’ai passé une radio qui m’a coûté 100 euros.
Je suis retournée voir le chirurgien à 90 euros la consultation.
Il m’a parlé de l’hallux rigidus et a affirmé que mes deux pieds étaient concernés. Génial.
Il m’a demandé si j’avais récemment posé du carrelage.
J’ai rigolé.
Mais la position lors de ce travail manuel pourrait être un élément déclencheur.
Est-ce que j’ai franchement l’air de kiffer poser du carrelage ? Je galère déjà pour monter une armoire Ikea !
Je lui ai rétorqué en revanche que  j’avais fait dix ans de danse classique, quand j’étais jeune.
Il a écarté cette piste. Trop lointaine.
Je lui parlé des heures de tapis de course avec une pente élevée durant lesquelles je faisais de la marche rapide. #CamilleGrandeSportive
Il a haussé les sourcils. Cela semblait davantage probable. #LeSportTue
Il m’a fait un devis pour une opération qui raboterait l’os.
Il m’a dit qu’il le reverrait à la baisse en fonction de ce que me dirait ma mutuelle.
#MarchandDeTapis
Je ne suis plus jamais retournée le voir.

Bon j’avoue, pour les photos je peux faire l’effort de mettre quelques minutes des talons. Vous pensiez vraiment que j’allais me débarrasser de mes 30 paires de pompes à talon ?!


J’ai décidé de consulter l’orthopédiste de la famille qui n’a pas le bistouri entre les dents, pour prendre un deuxième avis.

Ce dernier a affirmé que l’opération pour l’hallux rigidus, consistant à raboter les nouveaux os squatteurs, ne servirait à rien car cette pathologie risque de revenir au fil des mois.
La seule opération possible qui supprimerait le souci devrait être faite que le plus tard possible (genre 50 ans). Après cela, il ne me sera plus jamais possible de courir. L’articulation du gros orteil étant alors complètement bloquée. Super. Et si je me fais courser par un voyou dans le rue, je fais comment ? Je m’envole ?

En attendant ce jour fatidique, je vais allumer des cierges ou réciter un mantra pour contrer le mauvais sort, peut-être même aller voir un marabout. J’hésite. Non je plaisante. Je vais devoir passer par la case infiltrations. Une piqure de produits forts (tellement forts que ça tue les foetus), m’a prévenu mon médecin, limitée à trois fois par an. Et si malgré cela je souffre trop, il faudra alors opérer avant cinquante ans.

J’ai fait ma première infiltration en août 2017.
A la suite de cette piquouse, pendant une journée je n’ai pas réussi à poser le pied. Je ne m’attendais pas à ça. Je pleurais de douleur ! Quinze jours plus, j’ai marché sans aucune douleur pendant deux mois. Je devais refaire une infiltration en février 2018 car en octobre 2017 les douleurs devenaient de plus insoutenables. Le jour J, le rendez-vous a été finalement repoussé car je n’avais pas « assez mal ». Les crises d’arthrose peuvent parfois diminuer… pour mieux resurgir plus tard. #GrosSuspenseDansMyLife

A l’heure où j’écris cet article, 20H53 très exactement, je suis assise (affalée quoi) dans mon lit et je sens mon pied droit enkilosé. Je n’ose pas le remuer de peur de réveiller le diable… Aujourd’hui j’ai moins souffert qu’hier. Petite victoire. Mais bon…

Le truc le plus chiant dans cette histoire, c’est d’acheter des chaussures !
Plus de la moitié des pompes que j’essaie m’appuient sur l’articulation du gros orteil et sont donc immettables ! Je galère pour me trouver des shoes. Déjà que de base ce n’est pas un achat facile, alors là je ne vous raconte même pas la mission !! Et quand la vendeuse me demande pourquoi je ne prends pas la paire, me voilà en train de lui déballer la vie de mon ièp pour me justifier. Super.

Je suis bien consciente que dans le monde il y a pire. Je relativise. Mais je suis tout de même triste de subir ce calvaire si « jeune ». #SortezVosMouchoirs

Je souffre quotidiennement de douleurs chroniques au niveau d’un membre important du corps. Vous n’imaginez même pas la galère au quotidien. Par exemple, lorsque je dors sur le ventre (racontetavie.com) je dois décaler mon pied hors du lit pour éviter la pression directe du gros orteil contre le matelas. Sinon je souffre. Lorsque je marche j’ai mal. Si je marche rapidement j’accentue la douleur. Mais le plus stressant, c’est quand je me rappelle que mon autre gros orteil a déjà commencé à créer, lui aussi, de nouveaux os pour protéger son articulation… #PiedBricoleur

L’hallux rigidus de merdus est un petit calvaire que je ne souhaite à personne. Et j’ai beau en rire, dans le fond je suis peinée de prendre conscience que la santé n’est pas immortelle, même quand on est jeune ; )