CamilleG

Le projet El Pianista : sur les traces des disparues du Panama #2

Souvenez-vous (ou pas), fin 2018 j’avais publié un article pour approfondir le cas des 2 hollandaises retrouvées mortes dans une forêt du Panama en avril 2014. Par un heureux hasard, en effectuant quelques recherches sur Internet, je suis tombée sur Romain, un jeune homme de 21 ans, qui expliquait son souhait de partir sur les traces de ces 2 jeunes filles. Je l’ai interviewé au sujet de son projet. Vous pouvez retrouver l’article ICI. Il est enfin revenu, après plusieurs semaines sur place.

Pour retrouver la première partie de son bilan, c’est par ICI.

Place à la deuxième partie, plus longue mais tellement complète !

Il est maintenant temps de se pencher sur l’histoire de KRIS KREMERS et LISANNE FROON. Avant de partir sur une thèse, il est important d’établir une chronologie des événements.

J’en profiterai également pour vous partager le compte rendu de mon expérience sur le sentier El Pianista, lieu où les filles ont disparu, et de vous dévoiler ce qu’il en est véritablement. Une troisième partie suivra dans le but d’analyser tous les éléments que nous avons pu récolter, du moins les plus importants.

Je peux dès à présent vous annoncer avoir eu accès à des documents confidentiels qui incluent entre autres, l’autopsie et des photos inédites des deux filles.

Malheureusement en raison de leur caractère confidentiel, aucun de ces documents ne pourra être publié ici. Je tâcherai en revanche de vous fournir une analyse des plus clairs possibles des informations que l’on peut y trouver.

Message de moi, Camille : j'ai également refusé la publication de ces docs confidentiels sur mon blog. Par respect pour la famille et surtout parce que ce qui doit rester privé, doit finalement le rester. Les Youtubeurs, blogueurs et autres ne respectant pas cela, et voulant absolument créer le buzz, sans faire avancer l'enquête, font vraiment pitié.

Pour cette deuxième partie, je me baserai donc sur plusieurs documents dont j’ai eu la chance d’avoir obtenu l’accès. Parmi eux :

– Le journal intime de Kris Kremers.
– Le journal intime de Lisanne Froon.
– Un rapport hollandais destiné à la police panaméenne.
– L’autopsie des ossements.
– La recherche des fluides biologiques sur les affaires retrouvées.

Je compléterai ces informations avec mon expérience du sentier El Pianista et des données rendues publiques sur Internet. Les personnes citées dans cet article seront nommés uniquement par leur prénom pour préserver leur anonymat, mis à part celles qui ont déjà une certaine notoriété sur Internet.

Kris Kremers, née le 9 août 1992 et âgée de 21 ans au moment des événements, ainsi que Lisanne Froon, née le 24 septembre 1991 et âgée de 22 ans lors du voyage, sont deux jeunes filles d’Amersfoort au Pays-Bas.

Kris venait de terminer ses études d’éducation sociale et culturelle, et avait décidé de se spécialiser en éducation d’art à l’université d’Utrecht. Quant à Lisanne, en septembre 2013, elle obtenait son diplôme d’arts appliqués à l’université de Deventer.

Elles venaient de finir leurs cycles d’études et en guise de récompense, elles souhaitaient partir en Amérique latine pour perfectionner leur espagnol et expérimenter le volontariat auprès d’enfants défavorisés. Elles ne voulaient pas de simples vacances mais un vrai voyage, avec une signification derrière.

De gauche à droite : Lisanne Froon et Kris Kremers

Si je me fie à ce que l’on peut lire d’elles dans leurs écrits et de ceux qui les ont côtoyées, Kris est une personne extravertie, responsable et pleine d’énergie qui regarde la vie avec beaucoup d’optimisme. Et à l’inverse, Lisanne est une fille plutôt réservée, intelligente et une sportive dans l’âme qui pratique régulièrement le volley-ball. Toutes les deux forment un charmant duo qui se démarque visuellement du reste des autres touristes car Kris est une petite rousse d’1m68, tandis que Lisanne est une très grande brune d’1m84. Un contraste qui ne peut que sauter à l’œil lorsqu’on les croise.

Pays-Bas, mardi 17 septembre 2013

Leur histoire débute le 17 septembre 2013, lorsque Lisanne contacte pour la première fois Elles, une employée de l’agence « Het Andere Reizen ». Cette agence dont le nom signifie « une manière différente de voyager », est spécialisée dans les offres de volontariat et de langue à l’étranger. Créée le 29 mai 2005 par Judith, l’objectif est de proposer des voyages alternatifs pour répondre aux demandes de volontariat et d’immersion linguistique d’une certaine jeunesse en quête de nouvelles expériences. L’agence propose des options en Amérique latine et collabore notamment depuis 2007 avec Ingrid Lommers, propriétaire des cinq écoles «bSpanish at locationsb» réparties entre le Costa Rica et le Panama. Lors de ce premier contact par mail, Lisanne fait part de son intérêt pour du volontariat, ainsi que pour des cours d’espagnol en Amérique latine. Lisanne souhaite en savoir plus sur les offres que propose cette agence, afin qu’elle et son amie puissent éclaircir leur choix. A partir de ce jour là, Elles deviendra l’unique lien entre les deux filles et l’agence.

Pays-Bas, mardi 22 octobre 2013

Ce jour là, Elles envoie les offres de prix à Lisanne. Si à l’origine les filles étaient intéressées par le Costa Rica, leur choix se portera finalement sur le Panama. Ainsi Kris et Lisanne suivront en premier lieu deux semaines de cours d’espagnol à Bocas del Toro à « Spanish by the sea », une des écoles d’Ingrid Lommers. Toutefois celle-ci préconisait quatre semaines de cours, afin que les filles puissent êtres au point lors de leur période de volontariat. Cela ne semblait pas être nécessaire aux filles car celles-ci avaient déjà suivi des cours au Pays-Bas, d’autant plus que c’était davantage coûteux. Deux semaines étaient donc amplement suffisantes avant de participer en second lieu, aux quatre semaines de volontariat dans l’établissement pour enfants d’Aura, une panaméenne vivant à Boquete. Enfin, ce séjour se fera sous la supervision du personnel de « Spanish at locations » qui placera les filles dans une famille d’accueil adéquate.

Leur programme est le suivant :

Le 15 mars 2014, Kris et Lisanne rejoindront d’abord le Costa Rica en atterrissant à San Jose, la capitale.
Le 16 mars 2014, elles se rendront en bus et puis par bateau, à l’archipel de Bocas del Toro au Panama.
Du 17 au 28 mars 2014, elles suivront deux semaines de cours à Bocas del Toro avec « Spanish by the sea », la branche locale des établissements d’Ingrid Lommers.
Le 29 mars 2014, elles iront à Boquete où se trouve «bSpanish by the riverb», un autre établissement d’Ingrid Lommers, avant d’être récupérées par leur famille d’accueil.
Du 31 mars au 25 avril 2014, elles travailleront avec Aura en tant que volontaires auprès d’enfants.
Le 26 avril 2014, il sera alors question pour les filles de conclure ce voyage et retourner aux Pays-Bas.

El Pianista, Boquete, Panama, Samedi 1er mars 2014

Juliette, une touriste belge vivant à Amsterdam, entreprend dès 9h30 l’ascension du sentier El Pianista avec son mari. Peu de temps après avoir débuté leur marche, ils rencontrent un sympathique couple accompagné de leur enfant, qui n’éprouve aucune difficulté à maintenir un rythme rapide en famille. Juliette discute avec eux et aimerait bien les accompagner, mais n’arrivant pas à suivre le pas, elle poursuit finalement le sentier avec son mari. Ils ne sont toutefois pas réellement seuls car Blue, un chien husky, les accompagne. Ce n’est pas étonnant, ce chien appartenant au restaurant « Il Pianista » que l’on peut trouver à l’entrer du sentier, a pour habitude d’accompagner les randonneurs. Ce jour là, Blue se met en tête de marche et se retourne régulièrement vers le couple, comme s’il s’assurait que Juliette et son mari ne se trompaient pas de chemin.

Blue, le chien du restaurant « Il Pianista ».

Au bout d’un certain temps, le mari s’assied sur l’herbe pour faire une pause. Venant à peine de se remettre d’une grippe, il ne se sent pas capable de continuer. Blue, ce chien très amical, s’arrête avec eux et se laisse recevoir des caresses. Il refuse toutefois la nourriture du couple, mais sa bonne constitution laisse deviner que ses propriétaires le nourrissent très bien. Au cours de leur pause, ils croisent deux couples d’américains qui ont l’air d’avoir la cinquantaine. Le mari de Juliette ne désirant plus continuer, lui propose de demander à ce groupe d’américains si elle peut les accompagner. Le groupe accepte avec plaisir et le mari reste sur place en attendant le retour de sa femme.

Sans surprise, Blue reprend encore la tête de la marche. En faisant connaissance, les touristes américains surprennent Juliette en lui demandant si elle aussi avait été menacée par un homme au début du sentier. En regardant leur gestuelle, Juliette comprend qu’il était question d’une menace par arme à feu.

L’homme en question se trouvait derrière une maison sur la gauche du sentier, avec un mur en pierres sombres et en face d’une maison blanche. Ce témoignage trouble Juliette. Après quarante-cinq minutes, elle décide de se séparer du groupe pour redescendre le sentier et retrouver son mari afin de quitter le sentier. Sur le retour, Juliette et son mari passent devant la cette fameuse maison mentionnée par les américains. Il n’y a personne, mais Juliette remarque des voix d’hommes qui proviennent de l’arrière de la maison.

Ils poursuivent leur chemin et croisent un tracteur tirant une remorque avec trois chiens. Juliette est surprise, elle aperçoit Blue, redescendu en vitesse du sentier, qui s’approche du tracteur et se jette dans la remorque pour rejoindre les autres chiens. Le mari de Juliette pense toutefois qu’il s’agit sûrement d’un autre chien. Juliette et son mari passent à nouveau devant le restaurant à la sortie du sentier, et bien qu’intéressés par le fait d’y manger, ils choisissent finalement de repartir directement en ville.

Amersfoort, Pays-Bas, début mars 2014

Lisanne emménage avec Kris dans un dortoir, et travaillent ensemble dans un café-restaurant du nom de « In den Kleinen Hap ». Elles complètent ainsi leurs six mois d’économies nécessaires à leur voyage.

Restaurant « In den Kleinen Hap ». 

Pays-Bas et Costa Rica, samedi 15 mars 2014

C’est le grand jour, Kris et Lisanne se lèvent à 4 heures du matin pour rejoindre Schipol, l’aéroport international d’Amsterdam. Ce n’est pas un vol direct qui les attend. Elles vont devoir faire une escale de quatre heures à Houston après douze heures de vol. Une fois là-bas et la longue attente passée, elles prennent enfin leur vol qui atterrira quatre heures plus tard à San José au Costa Rica. Sur place, Kris et Lisanne sont récupérées par un couple qui les déposera à leur auberge de jeunesse.

Lorsqu’elles y arrivent, il est 22 heures. Kris s’écrie dans son journal « Quel voyage ! » et on ne peut que lui donner raison. Avec le décalage horaire, les filles ont passé les vingt-quatre dernières heures éveillées dans les transports avec l’anxiété de débarquer dans un pays qui leur est complètement étranger.

Kris et Lisanne disent au-revoir à leurs familles à l’aéroport.

Costa Rica et Panama, dimanche 16 mars 2014

Il est 7 heures du matin et Kris écrit alors dans la cour de son auberge, la première page de son journal de voyage. Bientôt les deux filles vont être récupérées par le même homme de la veille, qui les amènera alors au bus pour rejoindre le Panama. Kris rêvasse et se dit « Avec un peu de chance, nous verrons la beauté du pays, c’est tellement palpitant. Maintenant, le voyage a réellement commencé ».

Aux alentours de 18h30, elles arrivent enfin à Bocas del Toro, au Panama. Le trajet n’a pas été de tout repos car elles ont dû faire face à quelques déconvenues, tel que le fait de devoir traverser à toute vitesse San José en taxi afin de retirer de l’argent car elles n’avaient pas de monnaie sur elles. Ou encore le fait qu’à la frontière elles aient dû payer un coup de tampon qui aurait dû être gratuit. Toutefois les filles ne peuvent s’empêcher de s’extasier devant l’endroit qu’elles observent, et il arrive même à Lisanne de penser « Je pourrais éternellement vivre ici à Bocas, si un jour je prends ma retraite ».

Spanish by the sea, l’école où les filles ont logé pendant tout leur séjour à Bocas del Toro. Photo prise lors de mon séjour sur l’archipel.

Bocas del Toro, Panama, lundi 17 au vendredi 28 mars 2014

Dès le 17 mars, Kris et Lisanne commencent leurs cours d’espagnol avec « Spanish by the sea » qui se trouve sur Isla Colon, l’île principale de l’archipel de Bocas. Sur place, elles font la rencontre de Bas et Edwin qui tout comme elles, sont deux amis hollandais voyageant en duo. A la différence de Edwin, Bas participe à la même classe que les deux filles aux côtés d’un canadien, d’un australien et d’une allemande, et de leur professeur, Carlos. Entre les quatre hollandais, une amitié se nouent naturellement.

Ils profitent ainsi de leur temps libre en dehors de l’école pour aller manger et boire ensemble. Edwin décrit Kris et Lisanne comme « joyeuses, d’agréable compagnie et intelligentes », et relève que les filles ne montraient pas d’attitudes ambiguës et irrespectueuses avec les hommes. Il disait notamment d’elles que « Kris et Lisanne n’attendaient des hommes de se voir offrir des verres tout le temps, et offraient des verres en retour également». Toutefois, une différence de personnalité entre les deux filles lui sautait à l’œil. Il observe par exemple que « Kris est plus fougueuse que Lisanne », tandis que « Lisanne est plus douce et un peu réservée ». De leur côté, Kris et Lisanne sortent à la plage et font des excursions. Elles prennent par exemple un bateau pour observer les dauphins, se rendent sur l’île Zapatilla que Kris décrit comme «féerique», à la plage de red frog beach, ainsi qu’à celle de starfish beach.

Elles apprécient véritablement leur séjour là-bas, et font d’agréables rencontres. Sur une des plages, elle font la connaissance d’un autre hollandais du nom de Mart. Celui-ci voyage en solo en Amérique latine et projette de rejoindre Panama City le 22 mars, avant que les filles ne terminent leur séjour sur Bocas. Il partage de bons moments avec elles et décrit les filles comme étant d’une « intelligence normale, agréables, amicales, prudentes, et pas intéressées par le fait de réaliser des choses folle s». Mart ne les a jamais vues prendre de la drogue, ou encore entendues parler de choses qui pourraient sortir de l’ordinaire, auxquelles elles auraient participé ou été témoins. Le 22 mars il part à Panama City comme il l’avait annoncé, mais garde contact avec Kris et Lisanne.

La fin de leur séjour approchant à grand pas, les deux filles organisent le 28 mars un repas avec Edwin et Bas afin de leur dire au-revoir. Ils se retrouvent ainsi au « El Ultimo Refugio » puis s’en vont boire quelques boissons au « Barco Hundido » jusqu’à minuit. Edwin et Bas les décrivent alors comme elles l’ont toujours été durant ces deux semaines, « heureuses et relaxées ». Kris nostalgique, écrira par la suite dans son journal: « Le temps que nous avons passé à Bocas était vraiment agréable et nous avons célébré de véritables vacances. J’ai eu l’impression de faire mes adieux car il se pourrait que nous ne retournions jamais là-bas ».

Informations à relever sur la condition physique de Lisanne :
Elle confit à Edwin, avoir eu une hernie par le passé en faisant du volley-ball.

Il semblerait qu’elle ait subit une blessure à la jambe en jouant au volley-ball. Cela pourrait expliquer la périostite repérée plus tard lors de l’autopsie.

Dans son journal, elle écrit « Mes jambes sont tellement gonflées, ça doit être la chaleur car mes chevilles ressemblent à des pieds de rhinocéros ». En consultant un médecin de ma famille, il semble qu’il s’agit d’un phénomène banal chez une femme de grande taille. Il ne s’agit pas d’une condition pathologique provocant une inaptitude à l’exercice physique. Je ne maîtrise pas le sujet mais pour faire simple, la grande taille d’une femme, accompagné de certaines conditions tel que la chaleur, peut provoquer la formation d’œdèmes d’eau sous la peau et faire ainsi apparaître des gonflements. Il s’agit d’un problème de rétention d’eau dans le corps favorisé par la longueur des membres du corps.

En cherchant sur internet, il semblerait qu’elle souffrait peut-être d’asthme.

Information additionnelle quant à la relation de Kris et Lisanne avec Edwin, Bas et Mart :
Aucune relation sexuelle n’a eu lieu. Il n’était question que de relations purement amicales, d’autant plus que Kris était déjà en couple. Par ailleurs et sans que la question ne leur ait été posée, ils se sont portés volontaires afin de réaliser des tests ADN. Tests qui n’ont pas eu lieu car cela n’était finalement pas nécessaires. Je soulève ce point car cela montre que les filles étaient pudiques, et n’étaient pas du genre à fréquenter des gens aux mœurs fragiles (drogue, alcoolisme). Ce type de fréquentations peuvent être dangereuses. Les filles n’auraient pas été ouvertes à réaliser une sortie avec des hommes vraisemblablement à la recherche de relations sexuelles.

Kris et Lisanne prenant du bon temps à la plage.

Bocas del Toro et Boquete, Panama, samedi 29 mars 2014

Contrairement au premier trajet qu’elles ont fait pour rejoindre Bocas, celui de Boquete s’est fait sans encombre. Dans le but de rejoindre « Spanish by the river », elles ont dû descendre plus tôt du bus car l’école se trouve à Alto Boquete, la partie de la ville en périphérie. Kris confie « Nous avons dû descendre avant tout le monde, c’était un peu bizarre car ça avait l’air d’être au milieu de nul part ». L’école étant très proche de l’arrêt, elle n’a pas été difficile à trouver. Sur place, il ne leur reste plus qu’à attendre que leur famille d’accueil vienne les récupérer. Sur cet aspect là, Kris écrira le lendemain dans son journal que « C’était assez palpitant de les attendre. J’espère que cela va marcher et ça été le cas ».

La famille d’accueil les récupère et les deux voyageuses font la connaissance de Myriam, la mère, de ses trois filles et de ses deux petits-enfants. L’accueil est agréable et, les deux amies trouvent cette famille très gentille et amicale. Kris estime que pour une première journée, cela a été difficile de s’adapter car elle se retrouve dans une famille dans laquelle elle ne fait pas encore partie. Elle ne connaît pas les habitudes de la famille et en conséquence, elle ne sait pas comment se comporter. Il lui est également difficile d’échanger en espagnol avec eux, et cela se révèle ainsi très compliqué pour elle d’exprimer ses sentiments. En revanche, elle reste positive quant à l’avenir car elle estime que cela va s’améliorer avec le temps.

Pour Lisanne, le sentiment est encore plus intense. Ce soir là, elle écrit dans son journal « Je suis assise là, les larmes aux yeux et sur les joues ». Le passage de leur vacances à Bocas, à la vie dans une famille locale, est vécu par Lisanne comme une souffrance qui la fait devenir « folle ». Lisanne confie « J’étais clairement naïve de penser que je pouvais gérer ça, parce que c’est exactement une situation que je ne peux pas gérer ». Ses parents lui manquent et même si elle a 22 ans, et est censée être autonome, elle se sent comme une enfant de 2 ans criant pour que sa mère reste à moins de deux mètres d’elle. Pour elle, cette étape à Boquete est censé être une épreuve qu’elle doit traverser avec succès afin de mieux se sentir dans sa vie. Lisanne explique alors dans son journal, « Je me suis dit que je devais être capable de faire ça, le dernier test avant que je puisse être vraiment contente de moi. Jusqu’à présent, j’ai échoué misérablement. MERDE ». Malheureusement, les parents de Lisanne ne sont pas au courant des émotions qu’elle traverse. Elle ne souhaite pas les inquiéter, même si elle désire ardemment qu’ils la serrent dans leurs bras et lui disent que tout ira bien.

Photo de l’entrée de Spanish by the river, l’école qui supervise le séjour des filles.

Boquete, Panama, dimanche 30 mars 2014

Les deux filles en profitent pour visiter la ville de Boquete. Kris la décrit comme étant une jolie petite ville et Lisanne relève que celle-ci est entourée de magnifiques montagnes mais sujette à beaucoup de vent.

Lisanne se sent mieux, les larmes ont séché comme elle le dit dans son journal mais la vie en famille d’accueil est encore étrange pour elle. Lisanne se livre en écrivant « Je me sens toujours comme une étrangère dans cette famille ». Sa nuit de sommeil et son très bon toast pris au petit-déjeuner, ont dû lui redonner de la force. Dans l’après-midi, elles retournent à l’école pour s’informer au sujet de quelques activités à faire pendant leur temps libre durant la semaine de volontariat qui débute le lendemain avec Aura.

Kris est curieuse de savoir comment cela va se passer, alors que Lisanne est impatiente. Elles décident de réserver une excursion sur le volcan Barù pour le samedi suivant.

Boquete, une ville paisible. Photo prise lors de mon temps libre après les cours d’espagnol durant les mois de juillet-août.

 Boquete, Panama, lundi 31 mars 2014

 « Aujourd’hui était un jour bizarre », écrit Kris dans son journal. Sur le chemin pour rencontrer Aura, les filles étaient assez nerveuses et excitées. Elles s’attendaient à être reconnues par Aura qui était supposée les attendre, mais au lieu de cela, elles ont fait face à une dame très antipathique. Elles décrivent cette dernière dans leurs journaux comme « très impolie et pas du tout amicale ou accueillante ». Les seules paroles que celle-ci leur a adressé, étaient « Non, la semaine prochaine » et « Vous êtes seulement les bienvenues la semaine prochaine ».

Outrées et déçues, Kris et Lisanne sont parties chercher des explications à l’école. Sur place, aucune explication ne pouvait leur être donnée. L’école trouvait cela étrange, puisque ce projet était prévu depuis plusieurs mois. Ayant une semaine de libre, les filles demande alors à Marjolein, l’employée de l’école, s’il n’y a pas d’autres projet disponibles. Cela semble être le cas puisqu’il existe celui de « Casa Esperanza » mais Marjolein n’arrivait pas à joindre le responsable. Il leur faudra attendre au moins le lendemain pour obtenir une réponse. Le projet s’annonce intéressant et amusant, mais Kris reste dubitative à cause de la mauvaise expérience du jour. Toutes deux espèrent qu’elles vont aimer ce nouveau projet car elles ne veulent absolument pas retourner vers Aura !

Lisanne espère qu’elles pourront commencer le lendemain. Elle écrit dans son journal « Croisons les doigts ». Pour se réconforter, les filles partent le jour même vers Sigrid pour profiter un massage qui fut très agréable selon elles. Lisanne conclut son journal par une phrase pleine d’espoir, la dernière avant la disparition, « Demain sera un autre jour. A demain ! ».

Les filles n’informeront pas l’agence de voyage du refus d’Aura. D’ailleurs, cette dernière ne donnera jamais d’explication. A ce jour, Aura ne reçoit plus de volontaires et ne collabore plus avec l’agence « Het Andere Reizen ».

 J’ai eu la chance de discuter avec Sigrid, la masseuse, qui m’a donné plus de précisions. Sa rencontre avec les filles a eu lieu aux alentours de 18 heures et s’est terminée à 20h30. Les filles étaient anxieuses quant à la réponse qu’elles allaient recevoir le lendemain pour le volontariat à « Casa Esperanza ». Elles espéraient commencer dès le 1er avril. Elles ont également parlé de tout et de rien, tels que les voyages, les voyages de Sigrid, les études, les familles etc… Rien qui ne sorte de l’ordinaire. Aujourd’hui, Sigrid ne travaille plus au Panama mais a ouvert un salon de massage à Maastricht aux Pays-Bas. Marquée par l’affaire, elle se souvient encore exactement de cette soirée qu’elle a passé avec Kris et Lisanne.

Caldera Hot springs, Boquete, Panama, date inconnue et lieu inconnu finalement

Lieu inconnu

Sur cette photo dévoilée il y a peu de temps sur Internet, on peut discerner deux filles ressemblant étrangement à Kris et Lisanne. Aucune preuve matérielle ne démontre leur présence sur ces lieux. Les filles n’ont d’ailleurs jamais dit avoir été aux sources chaudes de la Caldera.

Alors pourquoi en parler me diriez-vous ? Il existe une théorie énoncée par un proche de la famille des Kremers, selon laquelle les filles auraient en réalité randonné sur El Pianista le 31 mars, et qu’elles auraient été enlevées sur un autre lieu, à la Caldera, le 1er avril. Dans le but de brouiller les pistes, les auteurs du crime auraient inter-changé les dates indiquées sur l’appareil photo.

Cette théorie envisage également une autre possibilité, celle que les filles seraient revenues du sentier le 1er avril et auraient fait une mauvaise rencontre ailleurs. Les filles seraient parties aux sources chaudes de la Caldera ce jour-là et elles y auraient rencontré leurs agresseurs. La dernière possibilité que cette théorie envisage est qu’elles auraient été à la Caldera entre le 30 et le 31 mars. Les agresseurs les ayant prises pour cible, ils auraient alors saisis l’occasion de leur randonnée sur El Pianista le 1er avril pour les agresser.

Je ne vous détaille pas cette théorie et les informations disponibles sur cette photo, puisque cela sera un des objets de la troisième partie du « Projet El Pianista ». Je jugeais toutefois pertinent de vous en faire mention dans cette partie.

Une randonnée sur El Pianista le 31 mars me paraît impossible. Si nous ne savons pas à quel moment les filles ont rencontré Aura, nous savons en revanche qu’elles se sont connectées au wifi à 16h41, et qu’elles étaient donc à l’école à cette heure-ci. Une randonnée sur El Pianista n’aurait pas pu rendre possible cette connexion à ce moment-là.

El Pianista, Boquete, Panama, mardi 1er avril 2014

A partir de ce jour-là, nous allons nous intéresser aux téléphones des deux filles, ainsi qu’à l’appareil photo de Lisanne, un Canon Powershot SX270 HS.

Kris possède un Iphone 4 avec une puce de « Holland T mobile » et sa dernière activité Whatsapp remonte au 31 mars à 17h10.

Lisanne dispose quant à elle d’un Galaxy S3 mini avec pour fournisseur téléphonique « Holland KPN », et sa dernière activité Whatsapp a lieu le 1er avril à 9h09. D’ailleurs ce jour là, avant ou à 9h09, elle recevra un message d’Edwin qu’elle ouvrira mais auquel elle ne répondra pas.

Via l’appareil photo de Lisanne, trente photos seront prises ce jour-là. Allant de la photo numéro 479, à celle numérotée 509.

Les horaires téléphoniques correctes se trouvent dans cet article : https://camilleg.fr/le-projet-el-pianista-les-donnees-officielles-des-telephones-portables/

Dans la matinée : Kris et Lisanne ayant finalement la journée de libre, elles décident partir randonner sur El Pianista. Elles annoncent sur Facebook qu’elles partent se promener, sans préciser l’endroit. Elles rencontrent Feliciano, un guide non certifié et réservent avec lui une excursion pour le lendemain à 8h.

Aux alentours de 11h : Kris et Lisanne commencent leur ascension du sentier El Pianista. Le chien Blue les aurait accompagnées. Les batteries de Kris et Lisanne sont à moitié pleine.

A 13h: elles atteignent le sommet, appelé le Mirador. Elles partiront s’aventurer au-delà du sommet très peu de temps après.

Vers 13h39 : les téléphones perdent contact avec le réseau téléphonique.

A 13h54 : elles prennent la photo 508. Dernière photo de la journée à notre disposition, car la photo 509 est irrécupérable malgré les traitements informatiques appliqués. La photo montre Kris à côté d’une rivière, regardant vers la caméra.

A 16h39 : le téléphone de Kris appel le 112.

A 16h51 : le téléphone de Lisanne appel le 112.

Dans le but d’économiser de la batterie, elles éteindront leurs téléphones après chaque tentative.

PS : le 112 est certes le numéro d’urgence en Europe, mais tous les numéros d’urgence se relayent entre eux et permettent donc d’accéder au service local.

PS2 : j’ai toujours entendu parlé du fait qu’elles auraient mangé ce matin-là avec deux autres Hollandais, mais je n’ai jamais rien trouvé de concret là-dessus.

PS3 : par rapport à la date de réservation de l’excursion avec Feliciano, je ne suis pas certain de cette date. D’après un journaliste du DailyBeast qui a eu accès à un rapport de police, Feliciano aurait déclaré avoir rencontré les filles le 1er avril afin de réserver justement leur excursion pour le lendemain. Aujourd’hui, Feliciano réfute cette information et affirme n’avoir jamais rencontré les filles en face à face.

Pourtant lorsqu’on lit les journaux de l’époque, Felicianio décrivait sa rencontre avec les filles à « Spanish by the river ». L’une se trouvait dans un hamac, tandis que l’autre se tenait devant une carte en regardant les endroits qu’elles pourraient visiter. Le témoignage de Feliciano se trouve dans l’article hollandais suivant : https://www.ad.nl/buitenland/misschien-zitten-kris-en-lisanne-in-afgesloten-huizen~a9d4fdd2/

Photo 508. Kris Kremers.

Jungle de Boquete et sa ville, Panama, mercredi 2 avril 2014

A 6h58 : le téléphone de Lisanne appel le 112.

A 8h : Kris et Lisanne manquent le rendez-vous avec Feliciano. Peu de temps après, celui-ci se rend chez la famille d’accueil des filles avec Eileen, la manager de l’école. Sur place ils attendent pendant une heure que Myriam revienne chez elle, pour avoir accès seuls à la chambre des filles. Il semblerait que Feliciano et Eileen aient passé beaucoup de temps à l’intérieur.

A 8h14 : le téléphone de Kris appelle le 112. Un imprimé d’écran de son téléphone est également pris, suivi par l’action d’un doigt glissant sur l’écran de l’iPhone.

A 10h53 : le téléphone de Lisanne appelle le 112 et le 911.

A 11h13 :  un tremblement de terre de magnitude 6 surgit dans la province de Chiriqui.

A 13h56 : le téléphone de Lisanne appelle le 112 et le 911. Le téléphone établit un contact avec le réseau téléphonique mais les appels n’aboutissent pas.

Dans l’après-midi : Feliciano retourne seul dans la chambre des filles.

A 16h : Eileen contacte Ingrid Lommers pour l’alerter que Kris et Lisanne ne sont pas revenues chez elles. Étant au Costa Rica, Ingrid lui conseille d’alerter la police elle-même.

A 19h30 : Eileen et Feliciano se rendent une première fois au commissariat.

A 21h30 : Eileen et Feliciano se rendent à nouveau au commissariat pour déclarer officiellement la disparition des filles.

Photo de la chambre des filles, prise pendant la disparition.

Pendant la période qui a suivi la disparition, de nombreuses personnes sont entrées dans cette chambre et ont distribué les photos à la presse.

Remarque sur Feliciano :

En lisant l’interview de Feliciano dans cette article datant du 13 mai 2014 https://www.ad.nl/buitenland/misschien-zitten-kris-en-lisanne-in-afgesloten-huizen~a9d4fdd2/ , un passage m’interpelle:

« Al hun spullen lagen nog bij het gastgezin waar ze verbleven. Ik heb het zelf gezien, ik ging mee toen er in hun kamer werd gekeken. Ik zag de tassen, identiteitsbewijzen, de mobiele telefoon. En ze zijn voor het laatst gesignaleerd bij het Pianista Trail, waar je kan wandelen. »

En utilisant Google traduction, je remarque que Feliciano fait mention d’un téléphone portable présent dans la chambre. Or c’est impossible car exactement un mois après la publication de cette interview, les téléphones de Kris et Lisanne ont été retrouvés dans le sac à dos. Il est alors légitime de se demander s’il s’agit d’une étourderie de la part de Feliciano ou pire encore, d’un mensonge macabre ?

Un appareil était bien présent dans la chambre des filles, mais il s’agissait probablement d’un MP3. La réflexion de Feliciano est par conséquent honnête car l’objet que nous voyons ici, peut facilement être confondu avec un téléphone.

Chambre des filles

Jungle de Boquete et sa ville, Panama, jeudi 3 avril 2014

Juste avant 1h du matin : Eileen appelle Dinie et Peter Froon, la mère et le père de Lisanne. Elle les prévient que depuis plus de vingt-quatre heures, leur fille n’est pas revenue de sa promenade avec Kris. Les Froon gardent tout de même leur calme, et se posent des questions quant à la signification de cet appel. Après avoir raccroché, Dinie appel Judith, la directrice de l’agence de voyage, afin de lui faire savoir que Lisanne n’est pas rentrée chez elle et qu’il en est de même pour Kris. Elles, l’employée de l’agence, étant la seule à avoir géré le dossier des filles, Judith ne savait pas pour Kris. Dinie rajoute que les parents de Kris n’ont pas encore été mis au courant. Avec le décalage horaire de six heures entre le Panama et les Pays-Bas, Dinie n’était pas totalement inquiète car les filles pourraient encore rentrer. L’appel étant terminé, Judith appelle immédiatement Eileen qui lui explique alors toute la situation.

D’après Judith, Eileen donnait l’impression d’être vraiment paniquée au sujet des filles. Plus tard après avoir été informé par les Froon, Hans Kremers, le père de Kris, appelle Eileen afin d’en savoir davantage. De la même manière qu’a été annoncée l’absence de Lisanne, Eileen explique que Kris n’est pas non plus revenue chez elle depuis plus de vingt-quatre heures. Dans le fond, elle pouvait entendre la mère de Kris, Roelie, crier et dire « Ça ne peut pas être vrai ». Eileen ressentait que Roelie était brisée à l’annonce de la nouvelle. Par la suite, Judith rappelle de nouveau Eileen et lui affirme que le problème doit être pris très au sérieux.

A 7h : Judith compose le numéro du ministère hollandais des affaires étrangères qui ce jours-là est intercepté par un certain Perry Berk. Elle lui explique alors l’ensemble de la situation. A ce moment-là, Judith s’est sentie aidée par le ministère. A la différence des Kremers qui se sont vus repoussés et pas épaulés, après avoir eux aussi cherché de l’aide auprès du ministère. Judith apprend de Perry Berk qu’il avait contacté Albert van der Zee (une personne de l’ambassade), et que celui-ci lui avait dit qu’il appellerait l’ambassade panaméenne.

Vers 8h : Sinaproc (Sistema Nacional de Proteccion Civil), commence pour la première fois à chercher les filles avec un hélicoptère.

A 9h33 : le téléphone de Kris appelle le 911.

Aux alentours de 13h : Judith téléphone à Ingrid Lommers. Durant cette conversion, Judith fait part à Ingrid qu’elle n’appréciait pas que Eileen, ne travaillant seulement que depuis deux semaines à Boquete, soit maintenant responsable des informations sur les filles qui ont disparu. Ingrid lui promet de revenir du Costa Rica aussitôt que possible. Celle-ci annonce également qu’elle appellera Sinaproc, et informe Judith que la police au Panama considère qu’il y a disparition après quarante-huit heures d’absence. Elle lui parle également de la conversation qu’elle a pu avoir avec Feliciano. Ce guide lui  a fait remarquer que différents types de personnes s’attirent des ennuis dans les montagnes. Ingrid a aussi entendu dire de la part de plusieurs individus, que les filles avaient ou été mises en sécurité par un indigène, ou continué de marcher et qu’elles apparaîtraient dans la province de Bocas.

Dans la journée : Feliciano part faire ses recherches sur le sentier El Pianista. Il ira au-delà du Mirador jusqu’à une clairière où il ne trouvera aucune trace de pas. Il en profite également pour demander de l’aide et des informations à des personnes qui auraient pu croiser les filles.

A 13h50 : le téléphone de Lisanne est allumé pour regarder s’il y a du signal.

A 16h: le téléphone de Kris est allumé pour vérifier le signal.

A 16h19: le téléphone de Lisanne est allumé pour vérifier le signal.

Jungle de Boquete et sa ville, Panama, vendredi 4 avril

 A 4h50 : le téléphone de Lisanne est allumé pour vérifier le signal.

A 5h : le téléphone de Lisanne est de nouveau allumé, mais il s’éteint à cause de la batterie qui est à présent vide.

Vers 9h : Sinaproc mène pour la première fois des recherches au sol.

A 10h16 : le téléphone de Kris est allumé pour vérifier le signal.

A 13h42 : le téléphone de Kris est allumé pour vérifier le signal.

Journée : les éléments récoltés pointent manifestement vers le sentier El Pianista.

Mise au point faite par Ingrid sur Facebook :

« Je pense que je devrais écrire ici ce qu’il est véritablement arrivé et ce qu’il est en train de se passer, car dans les médias aux Pays-Bas je peux lire qu’elles sont parties gravir le volcan Baru. Ce qui est totalement faux car elles ont réservé cette excursion avec nous pour samedi. Elles devaient aller samedi avec un guide et il leur a été spécifiquement dit de ne pas y aller seules. Il était 13h, les excursions étaient terminées. Nous leur avons donc donné des options. Elles ont regardé sur Internet (leurs dernières recherches pointent toutes à propos du sentier El Pianista) et sur une carte (focus sur le sentier El Pianista). Nous suspectons donc qu’elles soient allées sur ce sentier, mais elles auraient également pu randonner à un autre endroit, ou peut-être qu’elles n’ont pas été randonner du tout. La chose est que nous ne savons pas. C’est extrêmement inquiétant. Les autorités locales font beaucoup de recherches sur tous les sentiers (avec un hélicoptère aussi). Les volontaires ont fouillé partout. Il y a aussi beaucoup d’affiches collées partout. Demain nous partirons avec davantage de personnes pour les chercher.»

Jungle de Boquete et sa ville, Panama, samedi 5 avril 2014

 A 10h50: le téléphone de Kris est allumé pour vérifier le signal.

A 13h37: le téléphone de Kris est allumé pour vérifier le signal, toutefois aucun code PIN n’est entré.

Journée:

Un guide du nom de Plinio Montenegro poste sur Facebook une photo du sommet du sentier El Pianista, où il aurait randonné la veille. Il prétendra aussi avoir croisé et salué les filles sur le sentier le 1er avril à la mi-journée, mais il reviendra plus tard sur ses propos et affirmera s’être trompé de personnes.

Eileen quitte Boquete après avoir demandé à être mutée sur Panama City. Des rumeurs, et j’insiste bien sur le fait que ce sont des rumeurs, racontent qu’elle aurait eu peur et qu’elle se serait sentie en danger.

Photo prise par Plinio Montenegro au Mirador, le sommet du sentier El Pianista. Certaines personnes suspectes que celle-ci ait été prise le 1er avril mais ça, nous en reparlerons dans la partie 3.

Mise au point faite par Ingrid sur Facebook :

« Voilà une chose : le dernier moment où elles ont été vues, est ici autour de 13h à l’école. Après ça nous ne savons rien. Aujourd’hui, je vais aller voir ici autour du voisinage avec des photos en parlant à tout le monde pour voir si quelqu’un a vu les deux filles partir en direction de Boquete. Depuis l’école vous pouvez aller à Palmira, Boquete ou David. Nous ne pouvons pas nous restreindre à la recherche sur les sentiers d’ici. Nous avons besoin de savoir ce qu’il s’est exactement passé après 13h ici.»

« J’ai encore parlé à Sinaproc il y a quelques minutes : http://www.sinaproc.gob.pa

Le directeur Ubaldo Contreros a placé Francisco SantaMaria, le sous-directeur, comme pilote de « Operativo de Busqueda de las Holandesas Perdidas » (Opération de recherche des Hollandaises disparues).

Aujourd’hui, ils vont vérifier davantage de sentiers qu’elles auraient pu potentiellement prendre par erreur si elles avaient été sur le sentier El Pianista : Ceibo (nord de Boquete) et tout vers Bocas del Toro (la province), le sentier la Playita, et au nord d’une certaine ferme…

Pendant ce temps, ici à l’école, nous faisons de nouvelles affiches pour le quartier (pour découvrir si quelqu’un ici les a vues après 13h et dans quelle direction) et nous parlons à toutes les personnes que nous voyons dans la rue. A 9h nous allons découvrir si la « Scotia Bank » a quelque chose sur leur caméra de sécurité et nous en saurons plus sur la possibilité d’être diffusés sur la radio « Faro de David ».»

« Je viens juste de parler au DTJ (la police d’investigation ici à Boquete). Ils disent qu’ils font des recherches. Il y a trois personnes travaillant sur l’affaire. Hier, ils ont demandé à voir les caméras de sécurité de tous les commerces autour du parc, et il semble que sur une ou plusieurs d’entre elles, ils voient les filles en train de marcher vers le supermarché Romero peu de temps après 13h.. .»

« J’étais en direct sur la radio « Faro de David », racontant toute l’histoire, ce dont nous avons besoin, et parlant de la récompense de 2 500 dollars pour les retrouver ou pour avoir trouvé quelque chose leur appartenant. A 4h, ils feront de même sur la radio « Hosanna David ». Bien !»

Ingrid Lommers passant à la radio « Faro de David ».

« Oui, nous sommes allés à la conférence. La police, Sinaproc, les représentants de l’ambassade et d’autres, ont évoqué les conclusions qu’ils pouvaient dessiner. Pour faire simple, de ce que j’ai entendu, ils pensent que tous les indices qu’ils ont vérifié les amènent à l’idée qu’elles ONT ÉTÉ sur le sentier El Pianista.

La seule chose est qu’ils n’ont peut-être pas assez écouté Pedro, de la « Casa Pedro », qui a la forte impression qu’après la petite promenade qu’elles ont faite (seulement trente minutes en tout mais sur un chemin abrupte, Lisanne a attrapé froid) sur le sentier à côté de sa maison. Elles étaient tellement fatiguées qu’elles voulaient rentrer à Boquete.

Elles se sont assises par terre à côté de sa maison, disant qu’elles ne voulaient plus aller sur El Pianista mais plutôt, en ville. Elles sont restées assises là pendant un moment et il n’a pas vu comment elles sont parties et dans quelle direction. Cela devait être 15h au minimum.

Nous ne sommes pas certains que c’était bien elles, mais c’était définitivement deux filles, très jeunes, une plus grande que l’autre, avec un sac à dos noir, parlant anglais, mais pas un anglais natif.

Elles sont venues en taxi pour se rendre sur le sentier El Pianista (logique puisqu’en face de la maison il y a un panneau parlant du sentier), à côté de « Casa Pedro » et aussi une flèche montrant que vous devez continuer sur la route principale pour arriver sur le sentier El Pianista… Pedro/Peter a expliqué qu’elles auraient été plus loin jusqu’au sentier El Pianista mais… qu’il y a aussi bien ce sentier à côté de sa maison…

Depuis que nous savons qu’elles ont le plus probablement quitté la maison avec l’intention d’aller sur le sentier El Pianista (à l’école, elles faisaient des recherches sur le sentier El Pianista, même à propos de la localisation exacte du restaurant)… Peu importe. Je ne suis pas détective et je sais que vous devriez laisser toutes les autres possibilités ouvertes mais il semble bien que c’était Lisanne et Kris. Ce que nous ne savons toujours pas est si c’était elles, tout comme si après la première décision de retourner à Boquete, elles ont finalement changé d’avis et décidé d’aller sur le sentier El Pianista. Ce n’est pas logique qu’elles soient aller sur ce sentier si tard. Les témoignages sur le sentier El Pianista annoncent que des gens ont vu très tard deux filles (environ à 15h ou plus tard).

J’ai entendu que demain ils continueraient de rechercher sur le sentier El Pianista. Il y a aussi des initiatives de la part de volontaires demain pour aller vérifier en profondeur le sentier El Pianista et tous les lieux autour des sentiers. Je vais rencontrer le directeur de Sinaproc et je posterai plus d’informations. »

« Demain je ne vais pas marcher car l’ambassadeur veut que je vienne aider les familles qui arrivent demain, avec les traductions et les aspects pratiques. Désolé. Je crois beaucoup en l’histoire de Pedro. Je pense qu’elles étaient là-bas et qu’elles sont retournées à Boquete mais comment et avec qui, et qu’est-ce qui s’est passé… Telle est la question. »

Remarque sur Plinio Montenegro :

En 2014, les filles ont décidé de prendre le shuttle que propose l’auberge de jeunesse « Mamallena » afin de rejoindre Boquete. Pour cette raison il est important de relever qu’à cette période, Plinio Montenegro travaillait en tant que chauffeur pour cette auberge. Il est alors tout à fait envisageable qu’il ait rencontré Kris et Lisanne dès leur départ depuis Bocas del Toro. L’arrêt des deux filles ayant été plus tôt que celui des autres passagers, elles ont alors vraisemblablement dû interagir avec le conducteur afin de lui signaler qu’elles devaient descendre au niveau de l’école « Spanish by the river ».

Une interaction amplement suffisante selon moi pour permettre au chauffeur de les reconnaître quelques jours plus tard. Si Plinio nie aujourd’hui s’être trompé de personnes en se cachant derrière un argument un tant soit peu douteux se résumant à dire que toutes les européennes se ressemblent, une telle interaction n’aurait pas dû selon moi rendre une telle erreur possible. En revanche, il me faut vous signaler que rien ne confirme que Plinio ait été leur chauffeur le jour du trajet. L’auberge « Mamallena » disposant vraisemblablement de plusieurs chauffeurs, il est impossible d’affirmer avec certitude que celui-ci ait conduit le shuttle qui a emmené Kris et Lisanne à Boquete le 29 mars.

Pays-Bas, jeudi 3 au samedi 5 avril

Les parents de Kris et Lisanne interviennent sur les plateaux de télévisions pour demander de l’aide et alerter de potentiels témoins.

Les Kremers sont à gauche, tandis que les Froon sont à droite.

Jungle de Boquete et sa ville, Panama, dimanche 6 avril 2014

 A 10h26: le téléphone de Kris est allumé afin de vérifier le signal. Le code PIN n’est pas rentré.

A 13h37: le téléphone de Kris est allumé afin de vérifier le signal. Le code PIN n’est pas rentré.

Journée:

Les parents de Kris et Lisanne arrivent au Panama.

Sur Facebook, Ingrid Lommers met à disposition des photos des filles dans le but de permettre à tout volontaire de demander aux passants s’ils ont vu les filles.

Un couple de touristes francophones réalise la randonnée du Quetzal, qui est un sentier se trouvant près du volcan Baru et à une quinzaine de kilomètres à vol d’oiseau du sentier El Pianista. Ils pénétrent sur le sentier en commençant par l’entrée située à côté de Boquete, rencontrent un premier poste de garde et traversent la rivière Caldera avant d’entrer dans la jungle.

Une fois cette dernière atteinte, ils marchent pendant 3h30 avant de s’arrêter au poste de garde que je suppose être « Alto Respingo ». Sur place, un homme leur raconte un événement glaçant auquel il a été témoin la veille, c’est-à-dire le 5 avril. Il prétend avoir entendu des cris effrayés de deux filles, un grand bruit de chute et par la suite, trois hommes courir sur le sentier. En entendant cela, le couple comprend pourquoi il y avais autant de policiers ou de sauveteurs sur le sentier ce jour-là. Voici leur blog pour plus de précisions: http://etsionpartait-be.blogspot.com/2014/04/boquete-au-pied-du-volcan-baru.html

PS : si quelqu’un ici, lisant cet article, dispose d’un quelconque moyen de contacter ce couple, je serai bien intéressé et reconnaissant par le fait d’être mis au courant. J’aimerai poser certaines questions à ce couple. Mes contacts seront à la fin de l’article.

Carte du sentier le Quetzal.

Mise au point faite par Ingrid sur Facebook :

« Je suis également intervenue sur « Radio Chiriqui » et demain matin je recommence, à 5h30 et à 6h30, à propos de notre recherche visant à trouver toutes informations venant de personnes ayant vu Lisanne et Kris le 1er avril, après 13h à notre école à Alto Boquete ! »

« Nous organisons désormais toutes les initiatives privées et volontaires depuis « Spanish by the river » – Boquete. Cette nuit et demain matin, nous devrions recevoir des noms, des numéros de téléphones, et de possibles soutiens (randonneurs, chevaux, véhicules, argent, etc.) par messages Facebook, appels téléphoniques ou e-mails. Une fois l’inventaire prêt, et après avoir parlé à Sinaproc, nous établirons un planning de travail que nous communiquerons à toutes les personnes impliquées. Merci ! »

Jungle de Boquete et sa ville, lundi 7 avril 2014

Journée : les recherches continuent.

Nuit :

Sinaproc et les forces spéciales de Senafront passent la nuit sur un des lieux de recherche.

Les forces spéciales de Senafront réalisent pour la première fois des recherches la nuit en utilisant des signaux d’appel et de lumière.

Les équipes de Sinaproc et de Senafront.

Jungle de Boquete et sa ville, mardi 8 avril 2014

Entre 1h et 4h : cent photos de nuit sont prises à partir de l’appareil photo de Lisanne.

Parmi ces photos :

– Une photo de l’arrière de la tête de Kris qui semble être debout et vivante.

– Une photo d’un rocher où l’on peut voir deux bouts d’un sac en plastique rouge attachés à une branche.

– Une photo d’un rocher où est posé un objet circulaire réfléchissant, une sangle et un tas de petits papiers.

– Des photos prisent vers le ciel.

– Des photos prisent sur ce qu’il semble être une hauteur.

Les photos semblent avoir été prises au même endroit.

Ainsi si l’on éclaircit et regarde attentivement l’ensemble des photos de nuit, les mêmes arbres et les mêmes rochers apparaissent. Les photos montrent des angles différents, mais elles pointent toutes dans la même direction. Il est en outre difficile d’affirmer ce qui se trouve dans le noir quand les photos pointent vers le sol. Est-ce qu’il s’agit d’un fleuve masqué par la nuit, ou plutôt le vide d’une falaise? Savoir cela rendrait plus facile la tâche d’identifier le lieu que l’on voit sur les photos, et ainsi de déterminer s’il n’existe pas des éléments compromettant la thèse de l’accident et l’innocence de certaines personnes.

Journée : les recherches continuent.

Nuit : les forces spéciales de Senafront continuent de faire usage de signaux d’appel et de lumière.

Jungle de Boquete et sa ville, mercredi 9 avril 2014

A 8h : une équipe canine des Pays-Bas arrive avec huit chiens pour apporter leur aide. L’envoi de cette équipe canine répond à la demande d’aide réalisée par Betzaida Pitti, la procureure générale. Cette coopération se poursuivra par la suite sur le plan d’une enquête policière, où plusieurs personnes seront interrogées sur le sol européen et des recherches seront faites sur le sol panaméen.

Nuit : les recherches de Senafront se poursuivent de nuit.

L’équipe cinophile.

Jungle de Boquete et sa ville, jeudi 10 avril 2014

Journée : les recherches de Sinaproc se poursuivent.

Nuit : les recherches de Senafront se poursuivent.

Jungle de Boquete, lundi 7 au jeudi 10 avril 2014

 Ce sont 70 à 90 tentatives d’entrer le bon code PIN, qui sont réalisées sur le téléphone de Kris.

Correction :

Il semblerait que ces tentatives soient en réalité simplement des tentatives de vérifications de signal et non d’erreurs de PIN. J’ai simplement souvent entendu parler d’erreurs de code PIN, mais cela pourrait tout aussi bien être un mélange des deux.

Dans cet article hollandais de RTL Boulevard (https://www.rtlboulevard.nl/entertainment/artikel/1617296/panama-noemt-verdwijning-kris-en-lisanne-ontvoering), on y trouve la mention de quatre-vingts connexions sur les téléphones.

« De ouders zitten nog vol vragen. Zo zijn er DNA-sporen van een onbekende man en een onbekende vrouw op de spullen van de twee gevonden. Ook zou er zo’n 80 keer ingelogd zijn op de telefoons van de vrouwen. Dat zei oud-rechercheur Dick Steffens die de ouders van Kris bijstaat ».

« Les parents sont toujours pleins de questions. Par exemple, des traces d’ADN d’un homme inconnu et d’une femme inconnue ont été trouvés sur les affaires des deux. Il y a aussi environ 80 connexions sur les téléphones des femmes. Raconte, l’ancien détective Dick Steffens qui assiste les parents de Kris ».

Jungle de Boquete et sa ville, vendredi 11 avril 2014

 A 10h51 : le téléphone de Kris est allumé sans entrer le code PIN, afin de vérifier le signal. Il ne sera pas éteint après cette utilisation.

A 11h56 : après être resté allumé pendant une heure, le téléphone de Kris s’éteint définitivement.

Journée : les recherches de Sinaproc se poursuivent.

Nuit : les recherches de Senafront se poursuivent.

Jungle de Boquete et sa ville, samedi 12 au lundi 14 avril

Les recherches de Sinaproc et celles de Senafront se poursuivent, mais sont arrêtées définitivement le 14 avril.

Boquete, Panama, avril 2014

Devant la police, un conducteur de taxi du nom de Leonardo Arturo Gonzalez déclare avoir déposé les deux filles devant le sentier El Pianista à 13h40.

Boquete, Panama, 30 avril 2014

Avec une caméra, la police hollandaise scanne la zone près de El Pianista, ainsi que de celle de Palmira, là où elles ont logé. Aucun IP-Caméra ne sera trouvé. Des recherches seront réalisées sur l’historique des ordinateurs de l’école à Boquete, ainsi que sur ceux de Bocas del Toro.

Alto Romero, Province de Bocas del Toro, Panama, vendredi 13 juin 2014

A Alto Romero, un village situé dans la jungle de la province de Bocas del Toro et à 8 heures de marche depuis le sommet de El Pianista, une indigène fait une curieuse découverte. En marchant au bord de la rivière, elle découvre un sac à dos qui n’était pas présent la veille. Consciente que ce sac pourrait appartenir à Kris et à Lisanne, elle décidera de le transmettre à la police le lendemain après l’avoir montré à Feliciano. Après avoir passé 2 mois dans la jungle, le sac est dans un état incroyablement conservé. Il a été dit que cette femme aurait nettoyé le sac, peut-être avec Feliciano, mais ce n’est peut-être qu’une tentative inefficace d’explication sur l’état dans lequel a été retrouvé le sac.

Contenu du sac :

– Passeport de Lisanne.
– Lunettes de soleil de Lisanne.
– Téléphone Samsung de Lisanne.
– Soutien-gorge noir de Lisanne.
– Bouteille de 0,5 litre.
– Lunettes de soleil de Kris.
– Carte d’assurance de Kris.
– iPhone de Kris.
– Soutien-gorge de Kris.
– 83 dollars.

Les données recueillies sur les téléphones et l’appareil photos, révéleront une nouvelle chronologie. Alors que les témoignages plaçaient leur présence à l’école vers 13h le 1er avril, et sur le sentier après 13h30, on se rend compte que les filles étaient parties bien plus tôt sur le sentier. 

Sac à dos de Lisanne.

Jungle de la province de Bocas del Toro, Panama, juin 2014

Près du fleuve Rio Culebra, Feliciano avec une équipe d’indigène, découvre les ossements des filles. Parmi ces ossements, on ne retrouve que le pelvis gauche de Kris, et le pied de Lisanne. Le pied entier, à l’intérieur de la chaussette, se trouve dans la chaussure dont les lacets sont toujours serrés. Feliciano découvre également le jean de Kris près du Rio Culebra, pas très loin de là où a été trouvé le sac à dos.

L’endroit exact où ce vêtement a été trouvé, et dans quel état il était, demeurent imprécis. Il a été dit pendant longtemps que le jean avait été retrouvé soigneusement plié sur un rocher, mais cela ne semble pas avoir été le cas. Une chaussure est également trouvée, mais celle-ci ne semble pas appartenir à Kris. Rien n’a été mis en place par Betzaida Pitti pour indiquer les scènes où ont été découverts ces éléments d’enquête.

David, Panama, jeudi 19 juin 2014

Des tests ADN sont réalisés sur les ossements. Les jours suivants, il sera confirmé que les os appartiennent à Kris et Lisanne.

Panama, vendredi 20 juin 2014

Des tests biologiques sont réalisés sur les affaires retrouvées. Aucun fluide biologique, ni même de cellules épithéliales (cellules qui composent l’épiderme et qui peuvent par exemple se détacher au contact d’un objet avec la peau), ne seront retrouvés sur les affaires. Plus tard, lors d’une seconde analyse dont je ne dispose pas du document, il sera révélé que plus d’une dizaine d’empreintes ont été identifiées sur les affaires du sac et que des traces d’ADN étaient présentes. Là encore, rien ne sera fait pour vérifier les empreintes de chaque personnes ayant été en contact avec cet élément.

Affaires testées qui ne révèlent aucune trace adn dans le document dont je dispose :

– Resto de tela de color azul (bout de tissu bleu).
– Pantalon corto tipo jeans (pantalon court de type jean).
– Cobertor de pantalla de celular (A) (couverture d’écran de cellulaire (A)).
– Cobertor de pantalla de celular (B) (couverture d’écran de cellulaire (B)).
– Cobertor de celular color naranja (housse de téléphone de couleur orange).
– Cobertor de celular color verde (housse de téléphone de couleur verte).
– Estuche de camara de color negro (étui de caméra noir).

Jungle de la province de Bocas del Toro, panama, fin juillet – début août 2014

La côte droite de Kris est découverte.  En plus de ces faits énoncés, les os de deux autres personnes inconnues ont également été récupérés : le crâne occipital d’une femme indigène adulte et le péroné d’un enfant de moins de trois ans.

David, Panama, vendredi 15 août 2014

Le test ADN révèle que la côte appartient à Kris.

Jungle de la province de Bocas del Toro, Panama, vendredi 29 août 2014

Un morceau de peau enroulé appartenant à Lisanne est découvert près de son tibia et de son fémur.

Un médecin légiste ayant eu accès aux os se confiera anonymement en octobre dans le journal « La Estrella de Panamà », sous la supervision de la journaliste Adelita Coriat. Les articles ont aujourd’hui été supprimés, mais des internautes ont pu en faire des imprimés d’écran.

Carte approximative des lieux des découvertes.

La procureure Betzaida Pitti considére que la mort des deux Hollandaises est dû à un accident. Elles se seraient perdues après s’être aventurées au-delà du Mirador, et seraient mortes en tombant chacune d’un pont-singe.

Procureure générale, Betzaida Pitti.

Pont de singe en question (reportage vidéo Lost in Wild).

David, Panama, vendredi 19 septembre 2014

 Le rapport général d’autopsie des os est rendu, voici son contenu:

 Mes traductions présentent certainement des erreurs et des approximations, et je vous prie de m’en excuser. C’est pourquoi je vous cite également le texte original, afin que puissiez vous-même comprendre l’idée du texte dans le cas où vous maîtriseriez vous-même l’espagnol.

Kris Kremers: 2 os= 0,94% du squelette

– Pelvis gauche: Marques de racines, de carnivores et de rongeurs. Aucun traumatisme.

– Côte droite: Aucune marque. Aucun traumatisme.

Informations provenant du rapport détaillé de la côte de Kris Kremers et des os appartenant à deux inconnus, datant du 11 août 2014 (Peritaje 2014-08-08-P06 y 2014-08-08-P07) :

 « Es importante indicar que no esta senalado el N/W (norte y oeste), y por ende se desconoce el sitio preciso de ubicacion de les restos oseas, imposibilitando ubicarlos en un mapa geografico. »

« Il est important d’indiquer que le N/O (nord et ouest) n’est pas marqué, et donc l’emplacement précis des restes osseux est inconnu, ce qui rend impossible de les localiser sur une carte géographique. »

« Es importante senalar que los restos estaban secos, sin tejidos y grasas, con deterioro no solo en el hueso compacto, sino talbién en el esponjoso. »

 « Il est important de souligner que les restes étaient secs, sans tissus ni graisse, avec une détérioration non seulement de l’os compact, mais aussi de l’os spongieux. »

 « A su vez, todos presentaban una coloracion blanca que nos habla de dos hechos: que estuvieron expuestos al sol durante mucho tiempo o bien, que el sitio de inhumacion correspondia a un terreno de elementos quimicos muy basicos, afectando los fosfatos y los carbonatos de calcio de cada uno de los elementos oseos, causando la coloracion blanquecina. »

« À leur tour, ils avaient tous une coloration blanche qui nous renseigne sur deux faits : qu’ils ont été exposés au soleil pendant longtemps ou, que le site d’enterrement correspondait à une zone d’éléments chimiques très basiques, affectant les phosphates et les carbonates de calcium de chacun des éléments osseux, provoquant la coloration blanchâtre. »

Lisanne Froon: 30 os= 13,2% du squelette

– Fémur gauche.

– Tibia gauche.

– Les 28 os du pied gauche.

Marques de racines.

Aucun traumatisme.

Pathologie: «Periostitis».

Etant donné que je n’ai pas eu accès aux rapports détaillés de chacun des os de la jambe de Lisanne, je ne sais pas sur quels os exactement sont présents les marques de racines et l’inflammation du périoste.

Mes remarques :

Marques de racines : lorsque les racines poussent dans le sol, elles produisent de l’acidité. Cela a pour conséquence de produire des traces bien distinctives sur les os. Dans ce cas, est-ce normal de trouver ces traces sur des os trouvés à l’air libre ?

Periostitis : en français cela se traduit par périostite. Cela correspond à une inflammation du périoste, c’est-à-dire de la membrane externe de l’os.

REMARQUES DU RAPPORT GÉNÉRAL DU 19 SEPTEMBRE 2014 (Informe General de los Peritajes. Identification de Lisanne Froon y Kris Kremers.) :

« La falta de elementos oseos claves en el analisis y que causan la muerte del individuo, como por ejemplo el craneo, el sacro, las vértebras, las costillas y las pelvis. Con respecto a este hueso de la cadera, solo el peritaje de Kris Kremers se inventario un hueso coxal. […] En este contexto, la ausencia completa de la caja toraxica (vertebras o costillas), craneo o bien del cinturon pélvico (sacro y pelvis), establecerian posiblemente la muerte de las victimas. Esta tematica nos sugier el tercer comentario. »

« L’absence dans l’analyse des éléments osseux clés qui causent la mort de l’individu, tels que le crâne, le sacrum, les vertèbres, les côtes et le bassin. Concernant cet os de la hanche, seule l’expertise de Kris Kremers a inventorié un os coxal. […] Dans ce contexte, l’absence totale de la cage thoracique (vertèbres ou côtes), du crâne ou de la ceinture pelvienne (sacrum et bassin), permettrait éventuellement d’établir la mort des victimes. Ce thème suggère le troisième commentaire. »

« La falta de procesos tafonomicos (las huellas que dejan los animales y las acciones del ser humano) culturales que nos indiquen la muerte. Se analizo topograficamente los elementos oseos de cada una de las victimas. Se observo a traves de una lupa los detalles de las epifisis proximales y distales (inicio y fin de cada hueso), y la metafisis (parte media del hueso) de cada parte de los esqueletos de las victimas. No se encontro huellas producto de la accion humana, es decir, actividades relacionadas con traumatismos provocados por objetos cortantes, punzantes, corto-punzantes y proyectil de arma de fuego. A su vez, de cortes provocados por un demembramiento (cortes por secciones anatomicas del cuerpo) o bien de un destazamiento (cortes y golpes provocados en la parte media del hueso). »

« L’absence de processus taphonomiques (les empreintes laissées par les animaux et les actions des êtres humains) culturels qui indiquent la mort. Les éléments osseux de chacune des victimes ont fait l’objet d’une analyse topographique. Les détails des épiphyses proximales et distales (début et fin de chaque os), et la métaphyse (partie médiane de l’os) de chaque partie du squelette des victimes ont été observés à la loupe. Aucune trace d’action humaine n’a été trouvée, c’est-à-dire d’activités liées à des traumatismes causés par des objets pointus, tranchants et de courte portée et par des projectiles d’armes à feu. Même conclusion pour les fractures causées par le démembrement (coupures par des sections anatomiques du corps) ou par le démembrement (coupures et coups causés au milieu de l’os). »

« Dentro de la investigacion solo contamos con escasos restos oseos que dan una baja relacion porcentual. Tomando en cuenta la totalidad de huesos que componen un esqueleto humano, no contamos con evidencia de existencia de traumatismos oseos, en los indicios analizados, que hayan sido causados por agentes externos que no posibiliten determinar un intervalo post mortem ni la causa de muerte. »

« Dans le cadre de l’enquête, nous n’avons que quelques restes d’os qui donnent un faible pourcentage de comparaison. Compte tenu de la totalité des os qui composent un squelette humain, nous n’avons pas de preuve de l’existence de traumatismes osseux, dans les éléments analysés, qui ont été causés par des agents externes permettant de déterminer un intervalle post mortem ou la cause du décès. »

« Consideramos prudente esperar el aporte de mas elementos de analisis que nos permitan expedir un parte clinico de defuncion, de lo contrario ampararnos en el articulo mencionado, y de no haber mas evidencias que coadyuven a determinar una causa de muerte, se procederia por la parte interesada interponer el Organo Judicial para declarar una presuncion de muerte en ambos casos. »

« Nous considérons qu’il est prudent d’attendre l’apport de plus d’éléments d’analyse qui nous permettront de délivrer un rapport de décès clinique, sinon nous procéderons en vertu de l’article susmentionné, et s’il n’y a pas plus de preuves qui aident à déterminer une cause de décès, l’intéressé procédera à interpeller le Corps judiciaire pour déclarer une présomption de décès dans les deux cas. »

Ma remarque sur le rapport du 11 août 2014 (Peritaje 2014-08-08-P06 y 2014-08-08-P07) :

Le rapport identifie un os retrouvé comme étant le péroné d’un enfant de 0-3 ans. Or lorsqu’on regarde la photo inclus dans le rapport, il ne s’agit pas d’un péroné mais plutôt d’un radius (os de l’avant-bras). Ce dernier est complètement développé et ne pourrait alors qu’appartenir à un adulte. Toutefois en regardant attentivement la photo, on peut voir que le radius est plus court que la côte de Kris se trouvant juste à côté. Cette taille assez petite pour un radius d’adulte, permet d’envisager la possibilité que cet os appartiendrait plutôt à un nain ou à un singe. Dans le test ADN de Kris auquel j’ai accès, je remarque que cette erreur assez grotesque a été corrigé dans l’inventaire des os.

Je conçois qu’il ne s’agit pas d’une remarque liée aux os de Kris et Lisanne, mais cela pointe une faiblesse dans le travaille des médecins légistes qui selon moi doit être relevée. Si une erreur aussi grotesque a été commise, qu’en est-il alors de l’analyse réalisée sur les os de Kris et Lisanne ?

Panama, lundi 20 octobre 2014

 Articles «La Estrella de Panamà» de Adelita Coriat.

Imprimés d’écran réalisés par Scarlet/Nat.

Ceci est une traduction, et je vous prie de m’excuser si ma traduction contient des erreurs.

« Un criminologue examine le bout de peau de l’une des filles disparues. Un bout de tissu humain qui montre à peine des signes de décomposition, a été trouvé fin août, à côté du tibia et du fémur de Lisanne Froon.

Les équipes du laboratoire d’analyse biomoléculaire de l’ADN, situé dans la ville de Saber, sont venues courant de la première semaine de septembre, avec de nouvelles preuves liées au cas de Lisanne Froon et Kris Kremers.

L’agent médico-légal responsable du laboratoire se prépare à examiner le contenu du colis, en prenant des précautions pour éviter de contaminer l’échantillon : les gants, le bonnet en tissu, la blouse, le couvre-chaussures, le masque et les lunettes sont tous correctement placés. Maintenant qu’il est prêt, le colis est soigneusement ouvert. La curiosité du chercheur monte lorsqu’il enlève les bords de l’enveloppe pour atteindre le contenu. C’est un cas particulièrement intéressant, avec des versions contradictoires aux événements. Les filles ont été vues pour la dernière fois alors qu’elles essayaient de marcher sur le sentier El Pianista, dans la région de Boquete, le 1er avril 2014.

En août, elles ont été déclarées mortes par le ministère public, sans que la cause du décès ne soit encore connue. D’une part, la procureure supérieure de David, Chiriquí, Betzaida Pitti, qui est en charge du dossier, n’a pas considéré l’affaire comme un crime. Elle soulève la thèse que les filles sont mortes à cause d’un accident. D’autre part, Enrique Arrocha, avocat de la famille Kremers, et Octavio Calderón, un des criminologues consultés par La Estrella de Panamá, soutiennent qu’elles ont été assassinées.

Auparavant, le médecin légiste a analysé d’autres pièces osseuses trouvées par des habitants de Alto Romero, sur les rives du fleuve Culebra, dans la province de Bocas del Toro, un site situé à 12 heures de marche de El Pianista.

Le scientifique prélève une masse de terre en forme de boule sur l’enveloppe. Puis, il enlève un os long – dont on a déterminé plus tard qu’il s’agissait d’un fémur – et un autre plus court, semblable à un tibia. Le paquet, envoyé par le bureau du procureur de David, est arrivé accompagné d’une brève note dont les instructions sont résumées en une ligne :  » Ces restes ont été trouvés sur les rives du Culubra et sont envoyés pour analyse « . La note porte la signature de Betzaida Pitti. Il manque dans le document une description détaillée de la chaîne de possession, information requise dans les cas de processus contrôlés qui cherchent à préserver les preuves. Les données qui devraient être incluses sont l’endroit où les preuves ont été trouvées, la fixation, la collecte, l’emballage et le transfert sur les lieux. Or, ce n’est pas le cas. »

Découvrir la peau

Le laboratoire où les tests sont réalisés appartient à l’institut de médecine légale et des sciences médico-légales du Panama, le seul du pays qui effectue ce type d’analyse. Le médecin légiste est surpris par la masse de terre devant lui et commence à fouiller dans la matière pour déchiffrer ce qu’elle est. Peu à peu, il déplie le corps allongé, d’une trentaine de centimètres, qui ressemble à un morceau de peau. La précaution est prise de faire plusieurs prélèvements avant de commencer la procédure. Le médecin légiste cherche un seau en plastique avec de l’eau pour y plonger le morceau. Lorsque la peau est étendue sur la surface de travail (table), il constate que le tissu n’est pas uniforme. Certaines parties, les plus larges, mesurent entre huit et quinze centimètres de large. D’autres, par contre, n’atteignent que trois centimètres.

C’est la première fois que le médecin légiste examine un tissu de cette nature dans le cas des Hollandais. Plus tard, il définira quelle partie du corps cette peau recouvrait et à qui elle appartenait. En raison de son extension et de sa forme allongée, on peut supposer qu’il s’agit de la partie qui recouvre le fémur, mais cela sera confirmé plus tard par les examens.

Recouvert par les premiers agents de décomposition et de poussière – témoin de la partie sombre où se trouve probablement encore le reste du corps -, l’enveloppement de peau qui, il y a quelques mois, était utile pour protéger le corps du froid ou de la chaleur, des substances nocives, pour transmettre des sensations, fait aujourd’hui partie de l’ensemble des preuves d’un éventuel homicide.

Les restes osseux des filles et le tissu en forme de boule ont été trouvés le 29 août. Ce sont des données pertinentes pour le processus de recherche, car elles permettront au médecin légiste d’établir avec certitude le moment du décès, ou les conditions dans lesquelles le corps est resté par la suite. Si nous partons de l’hypothèse que les filles sont mortes au cours de la première semaine d’avril, aujourd’hui, cinq mois après l’événement, les larves ne devraient pas être présentes. Elles ont un aspect blanchâtre et mesurent environ un centimètre et demi. Elles n’atteignent pas la douzaine. Elles sont les premières à dévorer le cadavre. Cela indique au médecin que le corps reste, ou est resté, dans un espace humide, à l’ombre, à basse température. Avec beaucoup de soin, il observe qu’à une extrémité du tissu apparaissent des taches noires circulaires, qui occupent environ un cinquième de la surface. Elles sont de différents diamètres, le plus grand étant de sept millimètres. Une étude chimique ou histopathologique conclura, plus tard, à quoi répond ce groupe de taches noires. La même étude permettra de déterminer s’il y a eu d’autres lésions tissulaires. Le médecin légiste continue son travail. Il vérifie maintenant les autres points rouges, produits par l’hémoglobine musculaire. Dans certaines parties du tissu, il y a des trous, entre huit et dix sur toute la surface, sûrement signe de la présence d’autres types d’insectes.

Os conservés

En examinant le tibia, le médecin légiste s’aperçoit que celui-ci ne présente pas d’altérations osseuses. Lorsqu’il coupe l’os jusqu’à la moelle, il détecte un état sec, bien conservé et sans traces de putréfaction. Quelque chose de très similaire se produit avec le fémur, la moelle est presque intacte. Comment ceux qui ont prélevé les os ont-ils pu conclure que la boule recouverte de terre faisait partie des preuves?

Ignorance ou intention délibérée ?

Les tests doivent être manipulés avec une extrême prudence, dit le criminologue Calderón, qui critique le fait qu’à plusieurs reprises la procureure a demandé la manipulation des preuves de manière inconsidérée. Cela a été l’habitude de Pitti, depuis le moment où les restes apparaissent sur les rives du fleuve Culebra. Elle (Betzaida Pitti) n’a même pas appelé la criminalistique ou suivi les principes de base de la chaîne de détention, dit-il.

C’est une raison valable pour disqualifier la procureure, conclut le criminologue.

Calderón se demande comment cette personne est chargée des enquêtes au sein du Ministère Public. Toutes les preuves qui pourraient donner des informations sur la cause du décès ont été ignorées, en violation flagrante du protocole d’enquête. « Nous ne savons pas si cela était dû à l’ignorance ou à une intention délibérée, mais toutes les occasions d’obtenir la vérité ont été gâchées « , affirme Calderón. Et il ajoute :  » si c’est par ignorance, la question est la même : comment une personne qui n’a aucune connaissance des enquêtes peut-elle être l’autorité que représente le député ? Le criminologue poursuit :  » Et si c’est par dessein, quelles sont les raisons pour ne pas faire une enquête professionnelle ? « .

Récemment, la procureure a dit que les rapports médico-légaux n’ont pas pu déterminer les causes de la mort et que les restes osseux trouvés ne montrent pas de traces d’armes tranchantes ou de mutilations. Il a également indiqué que dans les endroits où les filles se sont égarées, il y a des animaux sauvages et des vipères. Les téléphones cellulaires des filles ont été utilisés correctement jusqu’au 6 avril. Avec l’appareil photo, 90 photos ont été prises en seulement trois heures, le 8 avril, dernier jour de l’inscription.

« Depuis le mois d’août, aucune nouvelle preuve n’a été trouvée. Lorsque le processus de décomposition commence, la peau a tendance à s’effilocher, mais pas à se remplire avec de la terre, raconte un anthropologue en criminologie consulté par La Estrella de Panama, qui a préféré ne pas voir son nom publié. À la discrétion du scientifique, l’état de conservation des preuves peut être un signe qu’elles (leurs restes corporels) ont été conservées dans un endroit froid, ombragé et humide.

Selon l’anthropologue, la forme prise par le tissu cutané ne semble pas faire partie du processus naturel de décomposition. La forme arrondie, dit-il, pourrait avoir été acquise en restant dans un sac, un dépôt caché ou dans une sorte de récipient. Le morceau de peau semble avoir été manipulé, dit-il. Il semble qu’il ait été stocké dans un environnement confiné. Enterré dans la terre, la décomposition des tissus mous a dû être plus rapide. L’os résiste, mais notre climat tropical accélère la décomposition, ajoute-t-il. En ce qui concerne les taches noires que l’on voit dans une cinquième partie du morceau de peau, le scientifique explique qu’elles peuvent être le produit de colonies de champignons ou de bactéries qui se déposent sur la peau. Les trous, explique-t-il, pourraient être faits par des prédateurs non stationnaires ou, peut-être, par des micro-organismes, précise-t-il. La présence de larves est importante car elle permet de déterminer l’intervalle post-mortem, du moment où la mort est survenue jusqu’à la découverte du cadavre. Depuis cette découverte, le 29 août, aucune nouvelle preuve n’a été recueillie ou rassemblée.

Les os de Lisanne ont été trouvés dans un état de décomposition très différent de celui des quelques os de Kris, bien qu’ils aient été trouvés dans les mêmes zones – insinuant qu’elles sont mortes plus ou moins au même endroit et donc probablement à peu près au même moment, que cela soulève la question de savoir si oui ou non Lisanne a simplement vécu plus longtemps, en captivité, et qu’une tierce partie a juste jeté quelques uns de ses restes au même endroit beaucoup plus tard…

Une boule de peau roulée de l’os du tibia de Lisanne a été trouvée, en plus de tout cela, cinq mois après la disparition des filles. Et cette boule était pratiquement encore intacte, et déterminée dans un stade de décomposition assez précoce. Cela ne correspond pas à l’histoire officielle selon laquelle Lisanne est morte à cause des éléments (une chute ou d’une noyade en avril 2014) et que ses restes gisaient dans la jungle, après des mois de pluie, de soleil, etc.

Ce sont là des faits scientifiques réels.

Cela pourrait intéresser tous ceux qui pensent que les filles se sont perdues et qu’elles sont mortes accidentellement. Malheureusement, les gens qui défendent ce scénario ne semblent jamais vraiment intéressés par les preuves médico-légales.»

Panama, jeudi 30 octobre 2014

 Article «La Estralla de Panamà» de Adelita Coriat.

Ceci est une traduction, et je vous prie de m’excuser si ma traduction contient des erreurs.

« Enrique Arrocha, avocat de la famille de Kris Kremers, l’une des Néerlandaises disparues, déposera aujourd’hui plusieurs recours contre la procureure Bethsaida Pitti, qui lui a refusé diverses procédures judiciaires, qui selon lui, pourraient éclaircir ce qui s’est passé lors de la randonnée sur le sentier du Pianista, dernier site que Kris Kremers et Lisanne Froon ont visité avant que toutes traces d’elles ne soient perdues le 1er avril.

Parmi les demandes qui ont été rejetées par le bureau du procureur, il y avait une « demande de nouveaux tests d’experts sur les téléphones et les vêtements des filles, qui étaient négatifs en ce qui concerne l’ADN, le sang et les fluides biologiques », a déclaré Arrocha. (Il s’est révélé plus tard positif pour l’ADN et les empreintes digitales). Il a également demandé à Pitti qu’une visite soit faite sur le sentier pour vérifier le temps nécessaire aux filles pour atteindre l’endroit où leurs affaires sont apparues : sac à dos, appareil photo, téléphone portable, etc.

Arrocha a fait une randonnée du Mirador de El Pianista, un endroit qui apparaît sur l’appareil photo des filles, jusqu’à la montagne, vers le fleuve Culebra, et assure que dans le temps qui s’écoule entre l’appel à l’aide et le moment où les filles prennent des photos en haut du sentier, « elles n’auraient jamais pu atteindre la rivière, car la distance en saison sèche est de presque 12 heures à pied », précise l’avocat. Apparemment, ajoute l’avocat de la défense, la procureure Bethsaida Pitti ne considère pas que ces expertises soient nécessaires. »

El Pianista, Boquete, Panama, novembre 2014

Un guide local du nom de Ivan Batista poste une photo de lui au Mirador. La pose qu’il prend attirera plus tard l’attention des internautes, qui y verront une imitation de la posture prise par Kris sur une des photos du sommet.

Ivan Batista.

Kris Kremers.

Et bien les internautes avaient vu juste, c’est le cas, il le dit lui-même sur son profil Facebook :

Boquete, Panama, fin 2014

Ici je vais vous raconter un témoignage qui m’a été personnellement rapporté sur Feliciano. Au cours de mon séjour à Boquete, j’ai fait la rencontre d’un indigène répondant au nom d’Ernesto.

Au départ ce n’était que pour me demander des cigarettes dans la rue, et puis j’ai fini par le recroiser à plusieurs reprises. Un jour, je lui ai expliqué vouloir randonner sur le volcan Baru avec Feliciano. En entendant le nom de ce guide, il me coupa et me déconseilla de partir avec lui. Ennuyé par son affirmation, je lui ai expliqué une chose : si c’est par rapport aux hollandaises et à son attitude inappropriée avec les femmes seules, je suis au courant.  De plus, en tant qu’homme, je ne dois pas trop l’intéressé.

Ernesto m’expliqua alors que cet homme est mauvais. Je cherchais à l’interrompre mais il poursuivit sans même me laisser prendre la parole. Il me raconta un événement inquiétant sur Feliciano. Un jour, fin d’année 2014, il parlait devant un bar avec un ami qui lui expliquait son intention de partir randonner sur El Pianista le week-end prochain. De manière innocente, il posa la question suivante: « Ce n’est pas là-bas où ont disparues les hollandaises ? ». Son ami fit une grimace, tout en lui faisant signe de se taire. Ce qu’Ernesto ne savait pas, c’est que Feliciano dont il ne connaissait pas encore l’existence, était tout près en train de discuter avec quelqu’un. En entendant Ernesto poser cette question, Feliciano s’était retourné et gardait le regard fixé sur les deux amis sans dire un mot. Dans la soirée, l’ami d’Ernesto reçu un appel de Feliciano. Ce dernier les menaca, et leur dit que s’ils continuaient de parler des hollandaises, cela va très mal se terminer pour eux. En entendant son histoire, je fus très étonné. C’est étrange cette attitude, surtout venant d’un guide qui avait tant aidé l’enquête et accompagné les parents des victimes.

Le prénom d’Ernesto est bien sûr un faux nom utilisé pour préserver son anonymat.

Jungle de Boquete et de la province de Bocas del Toro, Panama, mardi 13 au vendredi 16 janvier 2015

Les autorités panaméennes avec des enquêteurs néerlandais réalisent une dernière investigation dans la jungle afin de clore l’affaire. Ils concluront à la thèse selon laquelle, les filles sont mortes en faisant une chute mortelle du haut d’une falaise après s’être perdues pendant plusieurs jours.

Los Cangilones, Boquete, Panama, mardi 3 mars 2015

Leonardo Arturo Gonzalez, le taxi des Hollandaises, meurt dans d’étranges circonstances lors d’une baignade dans la rivière des Los Cangilones. Il sera annoncé que sa mort est due à une chute qui aurait provoqué sa perte de conscience, et par suite logique, sa noyade. Toutefois ce jour-là, César Castillo, un instructeur d’escalade était présent. Lorsque l’accident a eu lieu, ce dernier n’a pas pu voir ce qu’il s’était passé. En revanche, il a pu immédiatement voir le corps et celui-ci ne présentait pas de blessures à la tête. Selon lui, il s’agit d’un meurtre. Quelqu’un l’aurait noyé, mais pour quelle raison ? Un lien peut-être facilement imaginé avec le cas des hollandaises, qui presque un an plus tard, voit une partie à l’enquête mourir mystérieusement. Pour moi qui y suis allé en saison de pluie et le lendemain d’une averse, je trouvais cela improbable d’y mourir accidentellement. Des personnes de tout âge s’y baignaient, même une dame dépassant la soixantaine pouvait tranquillement apprécier la rivière.

Photo prise lors de mon passage aux Cangilones. Le milieu de la photo montre l’endroit où Leonardo se serait cogné la tête.

El Pianista, Boquete, Panama, samedi 3 août 2019

Pour moi, c’est le grand jour. Je me lève tôt ce matin-là, et je pars en ville avec la mère de ma famille d’accueil afin de faire quelques dernières courses. Une bouteille d’eau, du pain de mie, et du jambon pour compléter mon sac-à-dos, qui compte déjà de nombreux équipements en cas de problème. Je dispose par exemple d’une gourde filtrante, d’un panneau solaire avec batterie, d’un couteau de combat, d’une trousse de secours contenant des bandages, un sifflet et tant d’autres objets.

Je profite également de mon escapade en ville pour recharger ma puce « Movistar », la puce de mon téléphone, dans le but de garder plus tard un contact sur le sentier avec ma famille d’accueil.

Après avoir fait tout cela, il ne me reste plus qu’à rejoindre le bus pour être déposé devant l’entrée d’El Pianista. La mère de ma famille d’accueil m’accompagne jusqu’au bus et discute avec les chauffeurs pour trouver le bus qui y fait escale. A ce moment-là, je n’étais encore qu’un débutant en espagnol (LV2 Allemand au lycée) et je n’avais pas exactement tout compris. Je pensais qu’une fois arrivé, il me fallait attendre un autre bus qui m’emmènera cette fois à El Pianista, mais ce n’était pas le cas. Le bus était finalement un direct. Avant de monter dans le bus, la mère me fait un câlin pour me souhaiter bonne chance et me rappelle de lui envoyer un message au cours de ma randonnée.

Une fois arrivé sur place vers 10h, je demande une confirmation du lieu à un taxi qui s’était arrêté en me voyant au bord de la route, ainsi qu’à un homme rentrant dans le restaurant Il Pianista. C’est bien l’endroit, et un panneau confirme qu’il s’agit de la zone El Pianista. Il est alors temps de commencer la randonnée.

J’arrive très rapidement à une rivière où deux femmes indigènes nettoient leurs vêtements. En me voyant, l’une d’elle se dirige vers moi pour je ne sais encore quelle raison. Je profite alors de l’occasion pour demander si je me trouve bien sur le sentier El Pianista, et c’est bien le cas. Je doutais encore car j’avais cru comprendre, en prenant le bus, qu’il fallait que je prenne encore un autre bus pour rejoindre le sentier mais c’était simplement une erreur de ma part. Je continue et sur mon chemin, je traverse les habitations d’indigènes. Par moment le sentier devient très rocheux, mais c’est seulement le temps d’atteindre un petit pont depuis lequel on peut observer un hangar.

Un peu plus loin, il faut traverser un pont en métal qui donne sur un espace où les vaches vont manger, le long de la rivière que je viens de passer.

Le chemin continue après une barrière et amène quelques minutes plus tard, à d’autres petites propriétés. Les dernières avant de rentrer dans la jungle. Par la suite le chemin devient de plus en plus dégagé et je peux voir les montagnes se rapprocher au loin. La jungle est de plus en plus proche.

Une fois à l’entrée après 30, voire 40 minutes de marche, je sens que les choses deviennent sérieuses.

Le chemin est encore éclairé par les rayons du soleil et des panneaux rappellent que le sentier est entouré de propriétés.

Le sentier monte et l’on peut parfois retrouvé des déchets. Cela n’a rien de surprenant. Ce chemin est régulièrement fréquenté par les habitants. Certains habitent de ce côté de la montagne, comme d’autres habitent plus profondément dans la jungle et loin du sentier El Pianista. Les vaches utilisent également le chemin.

Après 20 minutes de marche depuis l’entrée de la jungle, je me retrouve à devoir faire un choix. Prendre le chemin qui monte, ou descendre vers la rivière. Voulant atteindre le sommet, j’ai pensé que la montée était le chemin à prendre en priorité mais c’était une erreur dont je prendrai conscience bien plus tard.

Dans cette direction, je marcherai pendant une heure. Une première partie est une montée, puis le chemin se découvre et l’on peut un peu mieux voir le ciel et capter le réseau téléphonique.

Ensuite, arrive la partie du chemin qui m’a fait prendre conscience d’être sur le mauvais chemin. Celle-ci descend et au fur et à mesure que je poursuivais cette direction, le chemin devenait de plus en plus abrupte. J’ai  également croisé un petit serpent qui ne bougeait pas ; j’ai été obligé de sauter par dessus pour avancer. Profitant qu’il y ait du réseau, je regarde sur Google map où je me trouve en pensant regarder si ça ne remonte pas en face et qu’il s’agit bien d’El Pianista car cela n’y ressemble pas.

En voyant qu’en face cela ne remonte pas, et qu’en plus de cela l’entrée est montrée autre part (une erreur de Google), je retourne sur mes pas pour retourner là où le bus m’avait déposé. Je pensais avoir vraiment été au mauvais endroit en voyant que l’entrée était autre part sur mon téléphone. Au retour, tout le monde sur place m’a confirmé qu’il s’agissait bien d’El Pianista mais que je m’étais trompé quelque part. J’ai fini par comprendre que mon erreur avait été commise au niveau de l’embranchement avec la rivière. Je n’aurais pas dû monter, mais plutôt la traverser. Une erreur que je ne commettrai pas la semaine suivante.

El Pianista, Boquete, Panama,samedi 10 août 2019

Pour cette journée, je décide de partir vers 8h30 en prévision d’une randonnée un peu plus longue. A la différence de la dernière fois, je prends un taxi qui me dépose au sentier vers 8h40. L’entrée est davantage vivante car je vois des enfants jouer dans le jardin de la maison rouge et je découvre que le restaurant possède un autre husky. En ne voyant pas Blue, je devine que celui-ci doit être mort depuis le temps.

Je vous passe le passage jusqu’à l’entrée de la jungle qui est évidemment resté le même. Au moment où j’arrive devant la jungle, la pluie commence à tomber. C’était vraiment la situation que je souhaitais éviter puisqu’elle m’oblige à ranger ma caméra qui n’est pas protégée contre la pluie.

Je la mets au sec en espérant que cela se calme rapidement, mais durant le reste de la journée, mis à part certains moment, la pluie n’a pas cessé.

Pour cette raison, je n’ai pas pris de photos entre la rivière que je n’avais pas emprunté la semaine précédente, et le Mirador. En revanche, j’ai pris des photos sur le Mirador et au-delà. Ceci étant expliqué, reprenons le chemin.

J’entre dans la jungle et rencontre quelques vaches que j’effraie. Je tente de les dépasser mais à chaque fois, elles décident de fuir dans la direction que je prends. Au bout de plusieurs essais, ces vaches ont l’éclair de génie de toutes se mettre au bord du sentier et de me laisser passer. Peu de temps après avoir réussi cela, j’atteins enfin la rivière que j’étais censé traverser la dernière fois. Je descends vers celle-ci et la traverse. Je remarque que sur un rocher est peint une indication. Certes imprécise, mais cela me confirme que je suis bien au bon endroit et que j’avais vu juste quant au lieu où je m’étais trompé.

Le chemin se poursuit en grimpant sur la droite, et à partir de cet endroit, on peut remarquer quelques cabanes sur les hauteurs de la rive opposée. Ces cabanes disposent d’un assez bon point de vu pour observer tous ceux qui traversent ce passage. Je continue mon chemin en regardant derrière moi, ainsi qu’en me faisant la remarque que si quelqu’un me suivait, je le remarquerai. Après tout, sur cette partie du sentier, je peux encore voir sur une bonne distance derrière moi et il serait difficile de se cacher. Au bout d’un certain temps, je rencontre à nouveau un embranchement qui amène sur deux passages différents.

Un chemin qui se dirige vers la même rivière que j’avais traversé plus tôt, et un escalier qui monte vers une plantation. Je décide de me diriger vers la rivière mais me rappelant de l’erreur de la semaine précédente, je décide de jeter en vitesse un œil sur la plantation. Au moment même où je me retourne, j’observe un indigène, machette à la main, sortir de la brume. Je ne l’avais absolument pas vu arriver, et je réalise que ma réflexion produite juste avant était erronée. Peut-être venait-il de la plantation ? Je ne sais pas. En pointant le doigt vers la rivière, je lui demande « El Pianista ? », question à laquelle il répond immédiatement « Si  !». Je traverse alors la rivière avec lui, et poursuis la montée juste avant de tomber sur un semblant de cul de sac.

Un arbre c’était effondré, et bouchait complètement le chemin sur une hauteur d’au moins trois mètres et une largeur de cinq mètres je dirais. Pendant un instant, la pensée que l’indigène m’aurait volontairement mal indiqué me traverse l’esprit. J’attends alors avec patience l’arrivée de l’indigène et celui-ci me montre à droite une butte de terre où un nouveau passage s’est formé à la suite du passage d’autres personnes. Je l’emprunte et remarquant que je marche plus vite que lui, l’idée me vient de négocier avec lui une excursion au-delà du Mirador. En revanche, ne maîtrisant pas encore l’espagnol, je décide de faire en sorte d’atteindre le sommet avant lui afin d’avoir plus de facilités à lui faire comprendre mes intentions sur le fait de vouloir aller au-delà du Mirador.

J’accélère le pas pour réaliser cet objectif, mais mon cœur ne suit pas la cadence. Après avoir traversé pour la troisième fois la même rivière, je me pose au sol pour récupérer mon souffle. Je manque de vomir à plusieurs reprises. Après quelques minutes, l’indigène me rattrape et regarde si je vais bien. Il me demande si c’est ma première fois ici et entendant ma réponse, il m’explique que c’est normal avec l’altitude sans y être habitué. Le voyant en train d’attendre, et ne voulant pas le ralentir, je lui ouvre le passage et lui propose de passer. Après cet échange là, je ne le recroiserai plus.

Remarque par rapport au récent reportage « Lost in the Wild » fait sur les Hollandaises par la chaîne Travel Channel.

Dans ce reportage on peut voir un indigène du village Alto Romero affirmer que la photo 508, et donc la dernière photo normale des filles, a en réalité été prise entre le Mirador et Boquete. Cette affirmation n’a aucun sens puisque lorsqu’on entre dans la jungle du côté de Boquete, il n’y a qu’une rivière que l’on traverse à trois reprises. Aucune de ces traversées ne correspondent à la photo 508. Je me permets de soulever cette remarque car ce reportage à créer de nombreux doutes parmi les internautes.

Une fois cette pause de 10 minutes terminée, je reprends mon ascension et la termine après une heure de marche. Sans cette pause provoquée par ma volonté d’arriver en avance, cela m’aura pris 2 heures au total. Ceci correspond au temps que les filles ont pris pour réaliser ce même trajet. Je suis trempé, il fait froid, et cela ne me permet donc pas de profiter d’une pause. J’observe autour de moi et vois qu’il y a une croix fleurie en hommage aux deux filles, une plaque de verre en mémoire de Kris et un panneau indiquant que le chemin qui se poursuit est sans retour.

Point de vue depuis le Mirador, mais ce jours-là rien n’est visible à cause de la pluie et de la brume.

Croix commémorative en l’honneur de Kris Kremers et de Lisanne Froon. A noter que le « s » de Kremers est manquant.

Chemin en direction de Boquete. Le panneau que l’on peut voir est celui qui indique qu’il n’y a pas de retour sur le chemin qui se poursuit à l’opposé.

Chemin qui se poursuit au-delà du Mirador. La photo ne permet pas de s’en rendre compte, mais cette sortie du Mirador était brumeuse et assez sombre lorsque j’y étais.

En voyant cette sortie qui me fait face, je décide de m’y aventurer jusqu’à trouver le lieu de la photo 508.

Je prendrai soin de ne pas trop y passer de temps pour plusieurs raisons. La première est celle que ma famille d’accueil m’a averti de ne pas y aller et ils savent donc combien de temps je suis supposé prendre avant de revenir. Cette famille habituée à recevoir de jeunes voyageurs étrangers, est restée très marquée par la mort des Hollandaises. Je craignais qu’ils ne prennent les devants très rapidement si je ne revenais pas avant la fin d’après-midi, et appellent les secours. Une autre raison est que je ne savais pas si j’avais le droit de m’aventurer ici, et ainsi, si je risquais une amende ou une autre sanction. Enfin si quelque chose m’arrivait, on me retrouverait certes (si c’est un simple accident), mais je me retrouverais bien dans l’embarras puisque j’avais assuré à tout le monde vouloir m’arrêter au Mirador. Avec tout cela en tête, je ne voulais quand même pas manquer cette occasion de voir ce sentier de mes propres yeux. Je voulais savoir s’il était réellement possible de se perdre là-dessus.

CARTE

Le chemin est très étroit et ne propose aucune alternative, c’est-à-dire qu’il n’y a qu’un seul chemin possible. Je trouve même ce chemin bien plus facile que celui du côté de Boquete. Cela ne laisse aucun doute quant à l’orientation que l’on doit prendre pour revenir. Cet avantage est toutefois une faiblesse si l’on subit une agression. Le chemin est tellement étroit que les seules options disponibles sont soit la fuite dans le sens opposé, soit le combat mais cela serait sûrement face à quelqu’un qui est armé d’une machette. Cet outil équipe la plupart, si ce n’est la totalité, des locaux qui vivent près de ces sentiers.

L’étroitesse du chemin ralentirait aussi la fuite puisque celui-ci prend une forme ondulée en descente. Courir dans ces conditions augmente les probabilités de tomber. Le plus grand point faible est la distance par rapport à la zone habitée. Si l’on dispose de la chance de pouvoir fuir dans la bonne direction, il faudra retraverser une distance que l’on a franchi en plus de 2 heures de marche, voire de 3h30 si l’on est descendu jusqu’en bas de la montagne. Tout cela en sachant que l’agresseur est certainement un habitué et en plus grande forme physique que soi. Les chances de s’en sortir en cas d’agression là-bas sont par conséquent minimes.

Les bêtes sauvages évitent cette zone, car elles ont peur de l’activité humaine.

Après environ 50 minutes de marche, je pense avoir atteint la photo 508. Toutefois avec le recul, je ne pense que cela soit le lieu malgré quelques doutes. L’endroit que je cherchais était sans doute à quelques minutes de l’endroit où je me suis arrêté.

Une vidéo réalisée en 2015 par des locaux montre, à mon avis, l’endroit où a été prise la photo 508 par les filles 54 minutes après qu’elles aient quitté le Mirador. Voici la vidéo sur laquelle vous pouvez voir la petite rivière de la photo 508 : https://www.youtube.com/watch?v=gnfol1KfUPc&t=257s  (4 minutes 17)

En 2014, la famille Kremers avait tourné une vidéo sur ce sentier en partant avec Feliciano et d’autres locaux. Le chemin après la photo 508 reste unique jusqu’au bas de la montagne que l’on atteint au bout d’environ 40 minutes après la photo 508. A cet endroit là, vous pouvez voir une clairière limitée par une barrière avec un sentier qui se poursuit sur la droite toujours en chemin unique. A partir de ce point-là, le premier pont-singe se situe à 3 heures de marche plus loin. Les premiers appels de secours émis par les filles auraient donc eu lieu à au moins une heure de marche du premier pont-singe.

En entrant dans l’état d’esprit d’un randonneur venu simplement marcher en journée, je suis certain que les filles ont décidé de retourner sur leurs pas peu de temps après la photo 508. Il faut se remettre dans le contexte : après 3 heures de marche il faut également anticiper les 3 heures de marches pour revenir. Moi-même sur place, je trouvais que cela commençait à faire long. J’anticipais : une heure de plus vers l’avant, c’est une heure en arrière de plus. Ainsi 3 heures de marche, se transforment en une randonnée de 6 heures. C’est ce qui a été mon cas personnellement. Alors il est difficile d’imaginer que les filles aient décidé de marcher une heure de plus car cela aurait nécessité 4 heures de marche pour revenir, soit un total de 8 heures de randonnée. Dans leur état d’esprit de jeunes filles venues simplement passer du temps, il est impensable qu’elles aient autant voulu occuper leur journée au point de s’épuiser avec des heures de marche supplémentaires. D’autant plus qu’à la photo 508, il était presque 14h et qu’elles devaient se dépêcher de rebrousser chemin avant qu’il ne fasse nuit.

En étant revenu au Mirador, je décide d’y rester encore quelques temps. Je repense à toute leur histoire et je réalise enfin, grâce à cette expérience, que la thèse de l’accident est impossible. J’envisage également avec certitude le fait qu’elles aient décidé de revenir sur leurs pas, et qu’elles se seraient faites agresser lors de leur retour. Au bout de 30 minutes, je me décide enfin à faire mes aurevoirs à Kris Kremers et Lisanne Froon en guise d’hommage et de retourner à Boquete. Ces 6h30 de randonnée sont décidément une expérience que je n’oublierai jamais.

Lisanne enlaçant son père pour la dernière fois à l’aéroport.

Le cas de Kris Kremers et de Lisanne Froon, est incontestablement une affaire criminelle marquée d’une profonde injustice. Au grand jamais ces filles n’auraient pu se perdre ce jours-là, et il n’y a donc aucune raison de penser que cela se soit passé de la manière dont la justice panaméenne le prétend. Pour moi c’est une certitude, après la photo 508, elles ont décidé de retourner sur leurs pas. Tout ce drame se serait passé entre l’entrée de la jungle du côté de Boquete, et le lieu de la photo 508.

A suivre sur le blog, le Projet El Pianista – Partie III : les pistes et les thèses possibles.

Camille et moi, pensons avoir identifié la source anonyme de la journaliste Adelita Coriat.

De plus, dans le récent reportage de « Travel channel: Lost in the Wild » au sujet de cette sombre histoire. Une journaliste est elle aussi allée sur place pour enquêter. Une des personnes interviewées, un expert qui a travaillé sur les fragments d’os des filles, filmée en masqué, dit mot pour mot que les filles ont été assassinées.

En conséquence, nous tenterons de réaliser une interview avec cette personne.

Si j'ai bien ressenti quelque chose pendant ce projet, c'est bien de la tristesse. Pas des frissons, je ne me prends pas pour James Bond. Cette affaire, je souhaite sincèrement qu'elle soit résolue. Derrière tout cela, il y a l'envie de faire avancer les choses.

Romain – romaincleo@outlook.fr

La partie 3 : https://camilleg.fr/le-projet-el-pianista-sur-les-traces-des-disparues-du-panama-3/